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Critique de Lenocherdeslivres


L'espace, lieu de liberté ou, au contraire, d'asservissement ? Les grands espaces permettent-ils à chacun de trouver sa place ? Plusieurs personnages vont se voir confrontés à cette question, dans l'immensité de l'espace ou dans la vastitude des glaciers d'une petite planète paumée de la confédération Epsilon. À la clef, des réponses et, pour y parvenir, des aventures à la pelle !

Un monde carcéral glacé
L'eau, ressource essentielle dans la conquête de l'espace, fait de Delas, une planète glaciaire, un gigantesque réservoir pour les planètes alentour. Les conditions de vie y sont tellement difficiles que ce sont des prisonniers qui l'exploitent. Leur vie n'a pas grande importance. Donc on peut réduire les coûts de matériel, tant que la main d'oeuvre est abondante et bon marché. Un classique ! Bliss et Fey sont deux de ces esclaves modernes. Ils risquent leur vie quotidiennement à la recherche d'une glace spéciale, le cryel. Il faut être formé et talentueux pour y parvenir. D'où leur importance (relative) dans l'ordre des forçats. Mais ils ne rêvent que d'une chose : partir de cette planète-prison.

Un space opera efficace
Or, d'autres intérêts plus vastes vont entrer en ligne de compte. Des intérêts qui vont faire basculer ce récit , presque intimiste au début, en space opera. Et, pour un premier roman, Jean Krug manie plutôt bien les codes du genre. Même si elles ne forment qu'une minorité des pages du Chant des Glaces, les parties qui évoquent les conflits entre la zone Bêta et la zone Epsilon, deux confédérations humaines ennemies, qui occupent chacune une zone d'influence, rappellent les séries militaires type Honor Harrington de David Weber ou de Haut Bord de H. Paul Honsinger. Les enjeux stratégiques sont clairs et bien définis : chaque confédération mène ses projets et a sa tactique, différente de celle de l'autre confédération ; les problèmes liés aux distances entre les différentes planètes sont pris en compte, ainsi que l'approvisionnement en ressources, vital. Et l'on retombe sur l'eau.

Qui a la connaissance possède le pouvoir
L'eau, qui est le point de départ de la vocation d'un autre personnage, capital, de ce roman : Jennah. On la voit grandir, d'étape en étape : sa jeunesse sur un monde sans eau, qu'un simple différent commercial peur assoiffer ; sa vie d'étudiante, frustrée par le carcan de l'université et l'obligation de passer par l'armée pour obtenir un financement et des moyens suffisants ; ses choix de militante pour la liberté et l'égalité, aux frontières avec la légalité. Elle est centrale par sa façon de penser, sa vision du monde. Elle permet des discussions intéressantes, quoique parfois un peu longuettes, sur la société et la place de l'individu dans ce groupe.

Un premier roman réussi
Vous l'aurez sans doute compris, le Chant des glaces est une belle réussite pour un coup d'essai. Car c'est le premier roman de Jean Krug, qui n'avait alors publié que de rares nouvelles. Malgré des points qui m'ont un peu fait sortir de l'histoire (par exemple, le style « oral » à la limite du compréhensible d'un personnage, heureusement peu présent dans le récit ; ou certaines lourdeurs ), je trouve la construction du texte efficace, avec une alternance entre plusieurs plans, plusieurs lieux, plusieurs intrigues. Les personnages, aussi, évitent dans l'ensemble le manichéisme parfois trop évident et agaçant au possible. Et, surtout, la passion de l'auteur pour la glace transpire à chaque page. Et il parvient à nous la transmettre, facilement, sans à coup. Il fait glisser des termes techniques comme une lettre à la poste, sans ralentissement. La vulgarisation est un talent que Jean Krug possède. Et ça donne envie de se précipiter dans un avion vers le premier glacier qui se présente.

Une petite note de musique
Et pour finir, un mot sur une note importante de ce roman, qui résonne du début à la fin des pages : la musique. Elle est présente dès le titre, rapidement expliqué puisque ceux qui chassent le cryel se nomment « chanteurs » / « chanteuses », pour leur capacité à comprendre la musique de la glace, sa partition, et donc le meilleur moyen d'en tirer le plus efficace. On la retrouve dans l'espace, avec la commandante d'un vaisseau, qui voit ses mouvements avec le rythme des mouvements musicaux (largo, adagio, presto agitato). Tout est lié, tout est harmonie (malgré des couacs).

Lire le Chant des des glaces, c'est s'offrir un voyage lointain et dépaysant, empli d'aventures et d'action, mais également agrémenté de réflexions qui permettent d'aller plus loin, de se distraire en s'interrogeant sur notre place dans la société (et ça, j'aime bien). Et de nos jours, qui voudrait s'en priver ?
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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