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Citations sur Aquariums (6)

« N’empêche, ce ne sont pas les canons à harpon qui ont asséné le coup de grâce. C’est notre indifférence. »
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On ne souhaite guère se faire rappeler que certains n'ont pas de chance, que la plupart du temps le bonheur naît du hasard.
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Un robot récite un magnifique et terrible poème tandis que des êtres transparents dansent sous mes yeux, sur un rythme qui leur est propre. (37)
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Elle a une pensée pour sa descendance. L’aînée n’a mis au monde que des mâles qui s’en sont allés quelques semaines après le sevrage.
Quel bonheur de voir ces petits êtres dodus et peureux se transformer en adolescents joueurs et aventureux ! Les cousins se rassemblent en bande. Ils partent ensuite conquérir de nouveaux territoires à la recherche de femelles inconnues à séduire. Les plus téméraires chargent et fendent la banquise là où elle est la plus épaisse. Les plaies qu’ils s’infligent témoignent de leur vigueur. Certains, moins forts ou au crâne plus mou, meurent noyés.
Elle n’a revu que trois de ses enfants au cours de sa longue existence. Son premier, elle l’a croisé quelques heures à peine après qu’il ait fièrement quitté le groupe de tantes et de cousines. Il flottait, la langue arrachée. Le travail des épaulards. Des requins s’affairaient à cisailler la graisse épaisse qu’elle avait scrupuleusement évaluée chaque jour de l’année qui venait de s’écouler. L’instinct maternel lui avait fait frapper le cadavre, les requins, tout ce qu’il y avait autour. Ses rugissements ont été entendus à des kilomètres à la ronde. Des parents, qu’elle n’avait pas croisés depuis des années, l’ont trouvée défendant la dépouille en vain. Elle n’a aucun souvenir des mois qui ont suivi.
Un harpon a terminé sa course dans le crâne du deuxième. Elle ne l’avait pas revu depuis soixante ans quand, par un malheureux hasard, elle a reconnu son appel de détresse. La suite de basses fréquences avait le même rythme que lorsqu’il était petit. Son instinct l’a poussée à en chercher la source et à ignorer la peur qui lui ordonnait de fuir dans la direction opposée. L’eau était rouge. Elle n’avait jamais vu autant de sang et de cadavres au même endroit, et pourtant elle avait échappé à plusieurs chasses terrifiantes. Deux neveux faisaient aussi partie des victimes. Le navire-usine hissait lentement les carcasses dans sa cale. Les chasseurs ont laissé derrière près de la moitié des proies qu’ils avaient tuées ce jour-là, faute de place. Quelqu’un avait la gâchette enthousiaste au canon-harpon.
Le troisième, elle l’a croisé beaucoup plus au sud, quand il fut à nouveau possible de s’y aventurer sans se faire empaler. Ils se sont vus souvent, en fait, durant les quelques décennies où elle avait pris l’habitude de longer la côte jusqu’à la limite des eaux chaudes qu’elle pouvait supporter. Moins gras qu’elle, il était plus rapide. Elle le trouvait beau, sa peau portait très peu de cicatrices. Il n’avait pas besoin de défoncer la glace pour respirer aussi souvent que ses parents du nord. Puis, un soir, tout heureuse de reconnaître son chant au milieu de la baie habituelle, elle avait découvert un individu maigre qui nageait lentement au prix d’un effort terrible. Il traînait avec lui de longs filaments dont il ne pouvait se défaire. Incapable de plonger, il allait certainement mourir. Sans se retourner, elle avait quitté cette baie riche et bruyante pour amorcer en solitaire sa migration vers le nord.
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Le plus beau jour de sa vie, une bête immense a sombré dans les abysses. Le squale savait que ça allait être gros. Les effluves étaient faibles, mais elles étaient partout. L’eau en était saturée. Il a d’abord passé plusieurs heures à tourner en rond, à chercher leur provenance précise, avant de s’élancer. Il a nagé longtemps pour se rendre jusqu’au cadavre. Il n’était pas le premier. À mesure qu’il se rapprochait de sa cible, il percevait la présence de centaines d’autres charognards en train de se gaver. Il est arrivé à temps. Il restait amplement de nourriture pour lui et toutes les créatures réunies pour festoyer. Les odeurs, la richesse de la chair, les pulsions électriques émises par ses congénères : la frénésie l’avait gagné à son tour. Jamais il n’avait autant eu conscience de son corps, de la force de sa mâchoire, du plaisir qu’il avait à rouler sur lui-même pour arracher des morceaux de suif gros comme sa tête. Un repas copieux exceptionnel qu’il a mis des mois à digérer en pourchassant une énorme femelle. Il menait une existence parfaite.
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Mon projet de doctorat consistait à reproduire les conditions de vie du récif de corail du Bélize. Je souhaitais secrètement que mon gouvernement me finance des vacances dans les Caraïbes, mais dans les faits, je n’ai passé que quelques jours sur place au cours de ces trois années de recherche, juste assez de temps pour recueillir mes échantillons. Toutes les données relatives à leur existence avaient déjà été compilées. Mon objectif était de les reproduire in vitro. Aucune importance qu’il fasse – 27 degrés Celsius à l’extérieur du laboratoire.
Mon passage à la douane fut l’incident le plus excitant de ma vie à ce jour. J’ai dû mentir aux douaniers, sinon j’y serais encore. J’ai prétendu rapporter des échantillons de dix-sept espèces différentes. En réalité, j’en avais au-delà de trois mille stockés en quantité microscopique dans les cinq glacières de haute technologie prêtées par l’université. Beaucoup d’œufs. Je me suis concentrée sur les espèces que je pouvais transporter sans trop de problèmes. Aucun requin-baleine dans mes bagages. J’ai identifié tous les échantillons avec des numéros, il était donc impossible de connaître ce qu’ils contenaient à moins d’avoir ma liste de correspondance ou un microscope à portée de mains. J’avais les autorisations environnementales nécessaires pour les quelques espèces déclarées, mais j’ai quand même dû poireauter près de quatre heures aux douanes canadiennes pendant qu’on manipulait les poches d’eau branchées au micro-ordinateur de leur glacière. Heureusement que les douaniers n’ont pas trop creusé. Ce n’est pas comme si j’allais approvisionner un réseau illégal d’espèces aquatiques exotiques. Mon ambition était à l’opposé du braconnage. Je souhaitais sauver ces espèces. Mon aplomb de doctorante et un peu de jargon scientifique ont été convaincants. Soulagée, j’ai pu quitter l’aéroport avec ma précieuse cargaison. Il était temps, les batteries des glacières étaient vides. J’ai pu les recharger dans la navette venue exprès pour moi, mais on a dû s’arrêter toutes les heures aux bornes de recharge pour que le véhicule se rende jusqu’à l’université.
Quatre-vingts pour cent de mes minuscules passagers ont survécu au transport. En partant pratiquement de zéro, j’ai cultivé chaque espèce de manière individuelle ou en très petits groupes en attendant d’obtenir une biomasse assez importante pour faire cohabiter tout ce beau monde. Il y avait des aquariums partout dans les laboratoires, dans les classes, chez moi, chez mes amis, chez mes collègues et chez mes professeurs. J’utilisais le système de gestion d’aquarium sophistiqué que vendent les animaleries, celui avec des ampoules DEL, une pompe et des régulateurs de température et de salinité. Henri a trafiqué l’application qui vient avec le système pour qu’on puisse travailler avec plus de variables. Je contrôlais des dizaines d’écosystèmes avec mon téléphone intelligent. Je recevais une alerte quand quelque chose n’allait pas. Inutile d’expliquer pourquoi je n’ai pas beaucoup dormi au cours de ces trois années.
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