AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de hervethro


La Bruyère est un philosophe écrivain atypique. Il a passé une partie de sa vie à composer un livre et l'autre à le modifier, le corriger et l'augmenter sur pas moins de huit éditions.
Cette somme, c'est un peu un traité de savoir-vivre au temps du Grand Louis, j'entends le Roi Soleil qui brilla pendant ce XVIIème siècle finissant tandis que La Bruyère compilait les travers de ses contemporains.
Ces caractères sont des portraits au vitriol des défauts et excès des gens de cour et de ville, c'est-à-dire cette faune de courtisans bien en vue – on les appelle dorénavant les people – ou de ces nouveaux commerçants, devenus la bourgeoisie qui, un siècle plus tard allait renverser la noblesse de sang.
La Bruyère n'épargne personne mais il le fait d'un point de vue pédagogique. Il entend que son recueil serve à corriger les égarements et, dans le dernier chapitre, il dévoile son dessein : que tous ces mécréants se soumettent à la volonté divine, bref : qu'ils deviennent de bons chrétiens. Les caractères ne seraient donc qu'un traité moralisateur. L'auteur ne s'en cache pas, opposant constamment la vertu au profit, égratignant les mauvais hommes qui se croient affranchis de Dieu en ne vivant que pour eux-mêmes.
Le propos final est, certes, un peu lourd. On aurait préféré juste des portraits sans concession, une peinture des moeurs de l'époque en quelque sorte.
Il faudra attendre le siècle des Lumières pour que l'homme en tant que penseur propre ne s'affranchisse des diktats d'une religion qui commence à s'essouffler sous les coups de boutoirs de la science.
Autre élément perturbateur, même si le Français du XVIIème a été expurgé de son orthographe, il n'en demeure pas moins une syntaxe et des tournures propres à l'époque qui ralentissent la lecture, malgré la présentation sous formes de traits, allant de la simple maxime qui tient en une courte phrase à l'illustration plus longue, parfois non dénuée d'humour.
Ces caractères sont présentés de façon à pouvoir y picorer un peu au hasard. Les remarques (ainsi que le souligne La Bruyère) sont regroupées au sein de seize chapitres, traitant chacun d'un fragment de la société.
L'édition est présentée avec un texte grec en introduction. Ce sont les Caractères de Théophraste dont s'est inspiré le philosophe et dont il a assuré la traduction qu'il propose en ouverture de son oeuvre.
Paradoxalement la lecture de la bonne vingtaine de portraits du disciple d'Aristote est plus aisée et également non dénuée d'humour. Sans aucune connotation moraliste, on assiste à une galerie de personnages tous plus hideux moralement les uns que les autres. Des gens pas fréquentables. Une vraie jubilation car on en connait tous au moins un.
Commenter  J’apprécie          00







{* *}