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Critique de krzysvanco


Juillet 1976, une jeune Roumaine de 14 ans, Nadia Comaneci, réalise un exploit historique dans l'épreuve de gymnastique aux Jeux Olympiques de Montréal : médaille d'or aux barres asymétriques et à la poutre, médaille d'argent au classement par équipes et médaille de bronze aux exercices au sol.
Lola Lafon nous parle du parcours de cette immense athlète entre 1969 et 1990.

Elle n'a pas la prétention de faire une reconstitution historique, précisant dès son avant-propos : « Si les dates, les lieux et les événements ont été respectés, pour le reste, j'ai choisi de remplir les silences de l'histoire et ceux de l'héroïne »,

Elle imagine notamment un échange de correspondance ou de coups de téléphone entre elle avec Nadia Comaneci lors de l'écriture du livre, elle lui envoie des passages que Nadia approuve ou auxquels elle s'oppose violemment parfois.

Cette astuce de dialogue permet à l'autrice d'apporter de la nuance dans nos jugements sur la situation vécue alors à l'Est de l'Europe, car la fictive Nadia se s'oppose à certaines de nos jugements occidentaux, j'ai trouvé ces différents points de vue très intéressants, j'ai en effet retrouvé certaines de mes réflexions lors de mes nombreux séjours dans la Pologne communiste de l'époque - certes c'étaient des régimes détestables mais tout n'était pas à jeter…

Ces dialogues fictifs jettent d'autre part de l'ombre sur certains événements de la vie de Nadia Comaneci, qui détient la vérité ? Par exemple quel fut le lien de la gymnaste avec le fils Ceausescu, comment s'est déroulée sa fuite du pays ?

Lola Lafon se garde de prendre position.

Par contre, elle nous fait bien ressortir le regard des hommes sur le corps de Nadia Camaneci, on la détaille, elle est si petite, si pure, si gracieuse, elle a « un si petit pouce », puis peu d'années après, se muant en femme, on la dénigre : elle a pris du poids, son corps a dés formes. Un journal français ose même ce titre
« 18 ans. La petite fille s'est muée en femme et la magie est tombée. »
Malaise sur ces changements vécus intensément par l'athlète qui considère cette évolution comme sa « Maladie ».

J'ai aimé le portrait de Nadia, la fée des Carpates, la description des sacrifices que son entraîneur Bêla imposait à ses élèves, exercices incessants, régime alimentaire qui les affamait, prise de poids incessantes, ces filles devaient se comporter dans les épreuves comme des garçons. Nadia a répondu à ses attentes.

J'ai aimé le portrait de l'entraîneur Bêla qui, le premier, a cru que des petites filles pouvaient concurrencer les redoutables gymnastes russes, plus âgées, plus femmes, a ouvert une école réservée aux meilleures, aux plus volontaires, aux plus à même, rejetant celles qui « avaient peur de se décoiffer », il valorise la force, le courage et la rapidité, à l'opposé de ce qui se faisait alors, favoriser chez les filles la grâce et la tenue pour impressionner les juges. Il croit en Nadia, la suit, la façonne alors qu'il n'a aucune connaissance en gymnastique.

Je ne puis oublier de souligner l'image que Lola Lafon donne de la Roumanie à l'époque, de son régime communiste, du rôle de la redoutable Securitate et surtout du Camarade, le « plus aimé de Roumanie », le Conducator Ceausescu apprécié à l'Ouest pour son opposition à Moscou, et son épouse Elena.

le régime se servira d'elle comme étendard, lui décernant le titre d'Héroïne du travail socialiste, Nadia prononcera des discours célébrant Ceausescu, « Nous, toutes les filles de l'équipe, avons senti la chaleur de votre amour parental et nous vous en remercions de toute notre âme, Conducator aimé ».
Elle sera proche du régime avant que celui-ci commence à la surveiller car elle lui fait de l'ombre.

C'est une oeuvre de fiction, une oeuvre très documentée, elle se lit facilement, les premières pages m'ont paru assez éblouissantes, j'ai aimé !
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