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Critique de Soukiang


Après avoir sauvé un enfant autiste dans le précédent opus, Lisbeth Salander purge une peine de prison pour mise en danger de la vie d'autrui.
Une simple visite de son ancien tuteur, Holger Palmgrem, suffira à activer une nouvelle connexion dans les méandres du brillant cerveau de notre hackeuse préférée.
Quand l'effet papillon surgit, il est peut-être déjà trop tard ...

C'est avec un plaisir coupable et non dissimulé que j'ai retrouvé Lisbeth Salander, à la seule évocation de son nom, à l'idée de la guetter dans les premières pages ou ultérieurement, cela suffit à mon bonheur et dans la continuité des 4 premiers tomes, cette nouvelle histoire va creuser en profondeur dans le passé de la protagoniste mais pas seulement, sans dévoiler ou spoiler, de nouvelles vérités vont émerger, vont se voir offrir une nouvelle lumière et surtout l'apparition de nouveaux personnages rendant non seulement le fil principal de l'histoire originelle encore plus mystérieux mais des intrigues secondaires vont venir accoster pour former une mosaïque complexe, un enchevêtrement de destins contrariés.

L'acquis et l'innée ...

A l'image des noeuds neuronaux ou ce que l'on appelle le carrefour des sciences et de l'intelligence, l'auteur, David Lagercrantz reste fidèle à ce qui définit son univers, l'idée est donc de ne pas copier ou de calquer son écriture sur son illustre et unique prédécesseur mais bien d'allier ses propres connaissances et expériences professionnelles au service d'une saga littéraire, d'une valeur sûre du thriller et de ses personnages, ce qui va soulever des questions fondamentales telles que la voix des opprimés, l'incertitude et la fragilité des statuts des immigrés, la lutte contre la discrimination des femmes privées de droits tels que la liberté, la marginalisation forcée de ces personnes qui sont vouées et livrées à elles-mêmes, les limites de la science et le sens de l'éthique, jusqu'où peut-on verser dans l'étude de l'être humain ? Jusqu'où peut-on transgresser les tabous et définir des schémas de vie, de transfigurer des existences, de violer des principes fondamentaux de droit commun, de flirter avec la zone interdite, de jouer avec le feu du destin ?

Toujours cette alternance dans le traitement des personnages principaux, des enquêtes d'investigation et de fonds fidèle à l'esprit de Stieg Larsson, des travaux poussées pour dépoussiérer des vieux dossiers, des témoignages qui disent et se contredisent, le travail de journalisme, Super Blomqvist connaît la chanson, il sait mener sa mission et faire agiter sa sphère professionnelle, c'est un don, il a le sens du détail, démêler le vrai du faux et vice versa, retourner toutes les pierres, des pistes froides qui succèdent à des indices probants, rien n'est jamais linéaire, c'est un parcours du combattant, des entrées, des subterfuges, des aléas, des variables qu'il doit constamment interpréter, nuit et jour, jongler et trouver des constantes, jongler avec, trouver l'angle d'attaque ou le point de contradiction qui lui permettra d'additionner et d'envoyer la note.

Complétude et intuition ...

C'est un peu le même leitmotiv pour son alter ego, sa muse, son modèle opposé et complémentaire, son moteur et sa motivation dans ce monde du bien pensant et du tout venant, dans sa partie du monde tellement aseptisée et respirant la zone de confort et de sécurité, l'idée d'un vrai journaliste d'investigation suant et courant à perdre haleine manque à Blomqvist, même s'il semble diriger sa barque somme toute tranquille, l'adrénaline et l'action sont des vecteurs suffisants pour trouver cette énergie et cette combativité propre, ce lien invisible et indivisible qui relie Lisbeth et Blomqvsit, même si le roman narre en dehors de leurs balises au profit de personnages et d'intrigues à tiroir, encore une fois les apparitions des deux protagonistes suffisent à donner un élan pour lire cet opus quasiment d'une traite, c'est addictif, c'est différent de la trilogie de Stieg Larsson et pour cause, l'importance de ne pas trahir la philososophie première, les principaux thèmes qui caractérisent l'univers Millenium, si la violence semble moins pesante, si le personnage de Salander semble moins trash, si le personnage de Mikael Blomqvist semble plus essoufflé, cela ne m'a gêné ou perturbé, mon sentiment est que cet opus est juste un trait d'union, un épisode dans la "deuxième" trilogie, celle de David Lagercrantz avant le suivant et dernier, le 6ème opus attendu pour l'année prochaine ?

Tout en sachant que son premier roman ou Tome 4 Ce qui ne nous tue pas sera bientôt adapté et sortira en octobre 2018 au cinéma, David Lagercrantz remplit bien son cahier de charges, ce n'est parce qu'il n'y a pas de grosses surprises que cet opus 5 n'est pas inintéressant, au contraire il ne fait qu'amplifier l'héritage de Lisbeth Salander, donner encore plus de visibilité dans ce passé trouble et troublé, dans sa relation largement évoqué dans le 4 avec sa soeur Camilla et qui trouve quelque part écho ici et en attendant la suite, l'apparition et la disparition de personnages cruciaux dans La fille qui rendait coup pour coup apporte aussi ce tourbillonnement et cette amplitude indispensable pour relancer et faire patienter, j'ose espérer un tome 6 volumineux, intense, dense à travers de nouvelles révélations et comme toute saga culturelle (franchise cinéma, série et littérature), la porte ouverte pour ... une nouvelle trilogie, la troisième du genre. A suivre.

Une ambiance toujours aussi paranoïaque, excellemment rendue, tendue, nerveuse, un régal pour se rapprocher encore plus de la réflexion et des pensées de certains personnages, des délires, des rêves, des instants uniques de lecture intime, être différent se conjugue au passé et surtout au présent, le combat ne fait que commencer, la vie est compliquée, tous le moyens doivent être mis en oeuvre pour se faire respecter et se faire entendre, l'auteur sait de quoi il parle en se faisant le défendeur de ces personnes bafouées, ignorées, blessées, oubliées dans la grande histoire (Alan Turing) et dans la fiction avec la reprise haut la main d'une égérie de fiction mais pas que, Lisbeth Salander.

En conclusion, pour compléter ou suivre la première trilogie, David Lagercranz trouve sa propre voie en implémentant de nouvelles révélations, à introduire de nouveaux et essentiels personnages secondaires, à étoffer un peu plus la psychologie de Lisbeth Salander et Mikael Blomqvist, toujours cette atmosphère si particulière de Stockholm et de sa météo capricieuse, une plume fluide et sans anicroche particulière, des chapitres courts qui participent pour une lecture rythmée et sans temps mort, un final étourdissant à l'image des fins des autres tomes, il subsiste des moments de grande tension tout de même, de ce suspense qui rappelle qu'il s'agit bien d'un thriller à ressorts multiples et complexes, je serai tenté de dire que c'est tout sauf jamais linéaire, comme dans la vraie vie, comme dans les premiers tomes, s'il est difficile de décrocher une fois commencé, c'est aussi pour mieux s'imprégner de certains personnages qui se montreront totalement surprenants et retors, antipathiques et compassionnels, le bien et le mal, l'épée et le glaive, le chevalier blanc sur son destrier, des scènes qui sentent bon la nostalgie et la mélancolie des temps révolus, de ces espoirs déchus et irréversiblement perdus, Millenium n'a pas perdu tout ce qui fait son charme et sa signature unique, je n'en attendais pas moins.
Rendez-vous est déjà pris pour le tome 6.

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