Citations sur Ne préfère pas le sang à l'eau (36)
On est aveugle à la beauté quand on la côtoie tous les jours
J'ai pleuré. La seule eau que je connaissais bien. L'eau de mon corps.
Alors oui, les livres, ces garnisons de mots qui nous préservent du vide, à l'heure où tant de faux prophètes brûlent les pensées qui les dérangent et attaquent au disque à découper les sites les plus anciens de l'humanité. (p43)
L'eau, ce ruisseau indispensable au paisible écoulement de nos jours. L'eau, ce diamant précieux et vital, qu'on s'arrache des mains comme des chiffonniers. On fait bêtement couler le sang pour ce qui relie la totalité de l'humanité. Ce trésor qui nous abreuve et qui nous lave, cette eau qu'on laisse couler sous la douche quand on se perd dans nos pensées, on chie dedans quand d'autres sont à genoux pour lécher le fond des mares. Ils se prosternent devant leurs trois ou quatre gouttes de pluie, quelques fois dans l'année. Papa l'avait dit, quand nous sommes arrivés : "Ne préfère pas le sang à l'eau. La vie, c'est gratuit. Ne fais pas couler le sang pour ce qui appartient à l'humanité.".
La République, c'est comme les vieilles concubines. On ne la cajole plus, on l'aime bien mais on a tellement l'habitude de la voir sous nos yeux, là, tous les jours, qu'on estime plus nécessaire de la gratifier d'un " je t'aime " , la vieille concubine se trimballe sur ses jambes de grabataire, elle attend simplement le moment de mourir.
Ce que je sais, en revanche, c'est que j'avais peur. Je défie quiconque de me dire que, bien souvent, la peur est bonne conseillère. La peur se glisse et se trompe, butte sur nos instincts et revient sur nos premières décisions. La peur se trompe et nous trompe parfois, parce qu'elle est humaine, voilà tout.
A quoi pense Tristan à présent qu’il écrit seul, dehors, et qu’il bombarde de lettres anonymes les foyers de la ville tout entière. A quoi pense-t-il maintenant qu’il sait que même les actes les plus minuscules ont d’immenses conséquences, qu’écrire, pour nos dirigeants, c’est comme tuer. Je n’ai jamais posé des bombes, je n’ai jamais tiré de rafales, je n’ai jamais lancé de pavés ni brûlé de voitures. D’autres l’ont fait et j’ai fini par y être mêlé. Dans ce pays qui s’étend sur une longue nuit, j’ai simplement écrit. Je n’ai rien fait si ce n’est écrire. Mais plaquer des mots sur la haine est une action comme un autre, et dans un pays où la loi du plus fort est toujours la meilleure, on arrête et punit de la même manière l’homme qui écrit et l’homme qui sabote. On meurt pour des idées, voilà ce que j’ai dit à Tristan lorsqu’il a souhaité nous rejoindre. Fais attention à ce que tu écris, on en meurt.
L'eau, ce ruisseau indispensable au paisible écoulement de nos jours. L'eau, ce diamant précieux et vital, qu'on s'arrache des mains comme des chiffonniers. On fait bêtement couler le sang pour ce qui relie la totalité de l'humanité. Ce trésor qui nous abreuve et nous lave, cette eau qu'on laisse couler sous la douche quand on se perd dans nos pensées, on chie dedans quand d'autres sont à genoux pour lécher le fond des mares. Ils se prosternent devant leurs trois ou quatre gouttes de pluie, quelques fois dans l'année. Papa m'avait dit, quand nous sommes arrivés : "Ne préfère pas le sang à l'eau. La vie, c'est gratuit. Ne fais pas couler le sang pour ce qui appartient à l'humanité."
Certains êtres humains sont capables de parcourir des milliers de kilomètres, d’embrasser les saisons et les climats, entassés dans leurs habits de fortune, pour boire. Simplement boire.
Alors oui, les livres, ces garnisons de mots qui nous préservent du vide, à l’heure où tant de faux prophètes brûlent les pensées qui les dérangent et attaquent au disque à découper les sites les plus anciens de l’humanité.