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Critique de Dionysos89


Après Chevauche-Brumes et Les Flots sombres, Thibaud Latil-Nicolas termine sa trilogie chez les éditions Mnémos avec L'Appel des grands cors !

Panique en Eterlandd
L'Est du Bleu-Royaume est en effervescence. En effet, nous avons quitté le territoire en proie à différentes menaces temporairement en suspens. Ainsi, la capitale Antinéa a subi un coup d'État de la part du clergé d'Enoch, dont son chef, l'Enochdil lui-même, prend en main la régence du jeune roi Téobane, mais peu sont au courant pour l'instant. Les Chevauche-Brumes sont stationnés au port de Barberon, avec la bénédiction de son bourgmestre, et ont commencé à trouver de nouvelles recrues mais leurs moyens sont bien faibles. Les quelques doryactes de la province voisine de Longemar qui ont pris fait et cause pour les Chevauche-Brumes aimeraient avoir le soutien des autres guerrières de leurs clans, notamment après les événements maritimes des Flots sombres. Quelques mercenaires issus des Chevauche-Brumes ont décidé de suivre le sorcier Jerod pour repartir tout au nord, au village de Crevet, afin de trouver des réponses et des moyens de battre les mélampyges, ces créatures d'encre venues d'une brume mystérieuse et au faciès particulièrement repoussant. Enfin, et c'est bien là le plus dangereux, la frontière nord-est, la province d'Eterlandd, est compromise par l'invasion de ces mélampyges aux formes très diverses (allant des humanoïdes aux arachnides…). Et c'est donc tout le Bleu-Royaume qui risque de se faire submerger par des nuées de créatures dont l'origine reste un mystère. En gros, c'est la merde !

À la guerre comme à la guerre
Tout de suite immergés dans l'atmosphère militaire de L'Appel des grands cors, il nous faut d'abord remercier le bon réflexe (dû à l'auteur ou à l'éditeur, on ne sait pas et peu importe) de placer un résumé des événements antérieurs en début de volume, c'est salutaire même quand on a adoré les deux tomes précédents. Car il y en a des choses qui se passent dans tous les sens et dans cet épisode, l'accent est clairement mis sur l'épopée. Bien sûr, ce n'est pas toujours beau à voir, mais c'est toujours beau à lire. On aborde là le ton des grandes batailles épiques, surtout la toute dernière. Thibaud Latil-Nicolas manie la plume comme Franc-Caquet la verve ou bien Barbelin la couleuvrine. La gouaille des combattants est toujours présente, mais les conditions font que l'humour n'a plus trop sa place. Par contre, on remarque toujours une grande précision dans la description de certains combats, notamment avec une variété de l'armement à souligner, lorgnant encore sur la « fantasy à poudre ». En outre, Barbelin, Dambline, Varago, Annom, Saléon, Franc-Caquet, Esquiche-Poussière et tous les autres sont (presque tous) là, cahin-caha, parfois en très mauvaise posture, parfois dans des situations catastrophiques, mais la solidarité est de mise, du moins entre eux. La palme de l'épopée revient toutefois à un nouveau personnage, Hondelbert La Muraille, haut-suzerain de l'Eterlandd, dont la lame Feleuse prend la mort à témoin quand il s'agit de défendre sa province ; et il me semble que la magnifique couverture de Qistina Khalidah fait référence à ce personnage, en tout cas ce serait justice. Par contre, la palme du pitoyable revient à l'Enochdil, dont les réflexes sont difficilement défendables, même en se questionnant longtemps sur ses objectifs, point faible de l'intrigue.

Liberté, amitié, solidarité
Dans ce troisième tome, Thibaud Latil-Nicolas approfondit avant tout les thématiques qu'il a déjà parcourues précédemment. Sans mettre véritablement en place un raisonnement politique sur le fonctionnement de ces provinces, l'auteur souligne la force de l'amitié et de la solidarité dans les moments de tension extrême, et pour survivre tout simplement. Mais on peut voir poindre quelques aspects plus approfondis, à commencer par le fanatisme religieux évidemment puisque le deuxième tome se concluait sur la prise de pouvoir de l'Enochdil emmenant à sa suite toutes les forces de la capitale Antinéa, dont le Dauphin. Il est alors intéressant de voir comment il est difficile de concilier des croyances théoriques et l'organisation concrète d'une armée en marche ; le cynisme est subtil, mais le personnage du marquis de Lancenys est celui qui est sur la ligne de crête : épris d'idéaux chevaleresques, mais contraint par le pouvoir religieux ; à l'inverse du chef religieux qui a tout pouvoir désormais, mais ne mène que par arrogance et mépris. Autre sujet abordé de façon intéressante : la place des femmes dans les situations militaires. Là, c'est évidemment les doryactes qui jouent le plus grand rôle ; les femmes des autres provinces sont davantage invisibilisées, contexte féodal et patriarcal oblige j'imagine, même si Emélia, la fille du baron Bérak, est particulièrement bien campée (noble mais travailleuse, dirigeante mais handicapée, il y a plein d'aspects de sa personnalité qui sont creusés ici). Les doryactes, donc, sont utilisées de façon plus annexe dans ce tome-ci, mais ont un système politique qui permet quelques chapitres bien sentis : système matriarcal mais qui n'assure pas pour autant plus d'égalité ou plus de sororité entre ses composantes, quand il ne fait que s'appuyer sur des clans à l'organisation verticale. Dans tous ces thématiques, les créatures d'encre, les fameux mélampyges, peuvent passer pour un simple décor, un peu comme des zombies dans Walking Dead…

Réussi, L'Appel des grands cors est donc un vrai tome final épique. L'attente est comblée et c'est là l'essentiel !

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