Dans ce recueil au ton mystérieux, un peu sombre, se mêlent, s'entremêlent étroitement l'amour- ses joies, ses inquiétudes -et Angkor , ville « assiégée », qui se perd dans les méandres presque effrayants de la forêt.
« Les arbres ont assez de force pour détruire d'Angkor tous les temples (…) lumière étrange de fin de tout ».
La contemplation des ruines est sans cesse intériorisée, prétexte à méditation sur la vie, à plonger en soi et dans le passé.
« Visions éphémères / scènes d'amour et de violence/ cours de palais, forêts et routes/se succèdent, s'impriment/dans la pierre de lave/ infiniment malléable/ de nos cerveaux/ visages nés pour disparaître /talismans de chair/ images sculptées sans fin/ la spirale de la vie s'enroule/ sous nos pas/ promenade étrange/à nos orgueils terrestres ».
A ces visions de nature très sauvage – « montagnes en ombres sur ciel fusain », le lac noir
(« cratère envahi par l'eau des pluies millénaires ») – fait écho « le labyrinthe intemporel des mères » qui vivent au rythme des besoins de leur enfant, elles et eux dont les « destins dont liés/ pieds et poings liés/ cordon ombilical/serpent mythologique ».
Des souvenirs, teintés peut-être de vague regret remontent, ainsi que les mots, sans doute longtemps retenus… « Femme fille mère / dans nos jeux /les rôles s'inversent/miroir de l'enfance/les souvenirs sont du futur/ qui s'écoule dans le jardin teinté/ mélange d'automne et d'été/ je rêve que ton père m'enlace/ mais il n'a d'yeux que pour toi ».
À la fois initiatique et onirique, le récit tire en particulier son charme d'une étrange et irrésistible douceur qui berce la lecture de la première à la dernière ligne...
Martine Rouhart
Lien :
https://www.areaw.be/jennife..