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Critique de Lybertaire


Il y a dix ans déjà, le 17 mai 2013, la loi pour le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels était promulguée (mais pas la PMA, qui a été votée… en 2021). Dans cette enquête, Rozenn le Carboulec, journaliste spécialiste des questions LGBTQIA+, raconte les principaux événements de cette période : l'homophobie de la Manif pour tous, des collectifs d'extrême droite et de l'église catholique, mais aussi la responsabilité du gouvernement PS de François Hollande alors au pouvoir, qui a permis à cette haine de s'exprimer en faisant de ce projet loi un « débat républicain », et celle des médias mainstream qui se sont fait volontiers le relais de ce déferlement de haine. Cet ouvrage est particulièrement instructif, car il retrace l'histoire de cette loi et en tire les conséquences dix ans après pour nos milieux militants et associatifs.

Parmi l'ensemble d'arguments nauséabonds et dénués de toute réalité sociale et de tout fondement scientifique, la préservation de la famille, de la démographie et des enfants sont tout à coup invoqués. Pour les opposant⋅es au « mariage pour toustes », il faut maintenir une société patriarcale et hétéronormée et une hiérarchie des genres, avec à sa tête la figure du père qui serait vitale pour le bien-être de l'enfant (notez l'attaque spécifiquement lesbophobe). C'est tristement ironique et hypocrite quand on sait que l'écrasante majorité des violences conjugales et familiales sont commises par des hommes, des pères, des oncles, et que l'église catholique, deuxième lieu de violences infantiles après la famille, ne sait pas protéger ses propres enfants des prêtres agresseurs et violeurs…

Tous ces propos homophobes n'auraient pu jaillir avec tant de violence sans la complicité des médias mainstream. Comme j'ai pu le montrer dans plusieurs chroniques sur le journalisme, ils ont véritablement créé l'événement de la Manif pour tous en relayant abondamment les images des cortèges de ses manifestations, la figure de Frigide Barjot, et en reprenant ses éléments de langage sans esprit critique. Ils ont par exemple grandement relayé la fameuse « théorie du genre » : ce concept essentialisant et fondamentalement inégalitaire, sorti du champ d'étude scientifique, est une énième panique morale visant à dénoncer le genre comme une atteinte à la différenciation et à la complémentarité entre les hommes et les femmes.

Et, comme toujours, les médias mainstream ont surreprésenté un mouvement minoritaire dans la société et invisibilisé la parole des concerné⋅es, en particulier des lesbiennes…

Mais dans cette médiatisation homophobe, l'autrice pointe en particulier la responsabilité des médias qui se disent de gauche. Car, sous couvert de se montrer neutres, de représenter tous les points de vue, de respecter la liberté d'expression, ces derniers ont aussi largement relayé les propos homophobes. Était-ce nécessaire, dans la mesure où les médias comme BFM, Le Figaro et La Croix le faisaient déjà abondamment ? Les médias dits de gauche auraient pu, au contraire, relayer les paroles des concerné⋅es pour contrebalancer l'ensemble du « débat » (si tant est qu'il y ait un débat sur la liberté de toustes à fonder une famille…).

Mais la responsabilité d'une telle violence incombe avant tout à la « gauche » de François Hollande alors au pouvoir qui, en créant un débat national, a permis à la droite conservatrice d'exprimer sans complexe toute son homophobie, comme si être homophobe était une opinion, pas un délit. Autoriser un débat sur le mariage, l'adoption et la PMA des couples homosexuels, c'est considérer que l'homophobie est une opinion comme une autre…

Pour l'autrice, l'extrême droite s'est organisée et structurée en France lors de la formation de la Manif pour tous en 2012-2013. C'est pourquoi, de notre côté, nous devons aussi nous organiser, consolider nos milieux militants et associatifs, afin de parer les attaques incessantes et les paniques morales en chaîne. Hier le mariage et l'adoption pour les homosexuel·les et la PMA, aujourd'hui encore les personnes trans, les femmes voilées, les habitant⋅es des quartiers ségrégués, exploités et paupérisés, les écolos, les anarchistes…

Nous sommes toustes concerné⋅es. Nous, les « wokistes », les « islamogauchistes », les « écoterroristes », devons rester particulièrement vigilant·es, car aucun droit n'est acquis pour toujours, comme on peut le voir aux États-Unis avec la régression du droit à l'avortement.

Organisons la riposte !

Lien : http://www.bibliolingus.fr/l..
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