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Critique de afriqueah



l'Clézio a vécu et travaillé plusieurs années au Mexique, nul ne peut être mieux placé que lui pour parler de ce pays. Et de sa révolution en 1910, avant la Russie , qui , dit il , marque le début des temps modernes.
Diego Rivera entretient, en même temps que son engagement politique dans cette révolution contre les abus des colons espagnols, une légende d'ogre, allaité par une chèvre, proche des milieux indiens, et pourquoi pas, allons jusqu'au bout de la légende, cannibale. de plus, grand peintre.
Quand l'ogre rencontre Frida la colombe ( non, pas Frida la blonde de Brel) fragile et beaucoup plus jeune que lui, sans expérience, fracassée par l'accident de tram qui aurait pu la tuer, et qui lui a laissé de nombreuses fractures, c'est l'évidence pour l'un comme pour l'autre : la passion de l'art et de la révolution va les unir toute leur vie. Diego a vécu à Paris, a déjà plusieurs enfants, plusieurs épouses et une renommée de peintre muraliste. Il a rencontré Picabia, Juan Gris, Braque, Modigliani, Soutine, et Picasso. Il éprouve pour Frida un sentiment inexplicable qu'aucune femme n'a fait naitre en lui, fait de désirs (pas assouvi, apprendrons nous, car Frida a le corps brisé) d'admiration et de respect pour cette petite femme si déterminée à vivre et à peindre. Elle l'émeut.
Ils voyagent, entre autres à San Francisco, à New York, côtoient l'intelligentsia de l'époque, reviennent au Mexique, chacun peignant de son côté. Diego , l'ogre, pour lequel la liberté et la liberté sexuelle en premier est nécessaire, cherche dans le corps des femmes la lumière, la radiance, les arrondis très doux, opposés aux instincts de mort et de guerre de beaucoup d'hommes. Frida, elle, accepte cette liberté puisqu'elle ne remet pas en cause sa relation avec Diego. Sauf quand il commet l'impardonnable : commencer une liaison avec la soeur de Frida, celle qui la rejette et qu'elle hait. Frida alors quitte Diego, prend un amant, celui qui fera des deux amants la photo lorsqu'ils se remarieront. Puis elle retourne vivre dans la maison bleue de son enfance. Elle a toujours refusé tout sentiment de possession et de jalousie, mais, là, Diego est allé trop loin, et il fait avec indifférence et sans scrupules. L'amitié perdure entre eux malgré tout, liés qu'ils sont par leur amour de la peinture, et leur engagement révolutionnaire. Lorsque Diego dans une fresque – pour laquelle il avait mis le meilleur de lui même- commandée par Rockefeller, insère la figure de Lénine, et perd son travail à New York, elle le soutient. Ils se remarient donc, essaient une vie plus détachée, chacun chez soi, cependant Diego est happé par l'ardeur sexuelle qui le travaille et Frida s'éloigne de nouveau. Elle peint beaucoup pendant ce temps, souffre beaucoup aussi de ses anciennes fractures, se peint elle même souffrant, seule et fracturée. Ce couple hors du commun, qui a rencontré Trotski et André Breton, venus chacun les visiter au Mexique, a vécu une histoire d'amour pleine de toutes les déraisons, la vie d'artiste, ses exagérations et ses illuminations. J M le Clezio nous fait revivre l'union de ce couple désuni, et uni aussi, qui reproduit la dualité des deux dieux mexicains opposés et complémentaires.
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