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Critique de BENE2312


Marin Ledun est un auteur qui sait s'écarter des poncifs du polar. Ses intrigues ne se déroulent pas dans les paysages enneigés de Scandinavie, dans les mégalopoles américaines ou encore dans les montagnes du Montana. Il varie les lieux et les enjeux avec bonheur. Ce qui suppose assurément un gros effort de documentation, dont bien d'autres auteurs préfèrent sans doute se dispenser. Des barbouzeries contre-terroristes au Pays Basque au management dysfonctionnel d'une plateforme d'appels, en passant par la contrebande de cigarettes dans les Balkans, Marin Ledun sait changer les toiles de fond et associer à ses intrigues des problématiques puisées dans l'actualité, parmi les faits divers les plus chargés de signification sur la marche chaotique de notre monde.
Cette fois, après un bref passage par la porte de Pantin -haut lieu de la prostitution bas de gamme-, Marin Ledun nous entraine au Nigéria et démonte les filières du trafic d'être humain dans ce pays riche de potentialités mais miné par une gouvernance calamiteuse et une corruption endémique de l'appareil d'Etat (sans parler des tensions interconfessionnelles et interethniques).
Une jeune journaliste pigiste française, aidée par une l'ONG locale de défense des femmes -« Free Queens »- remonte donc la piste des hommes qui ont conduit de sa patrie au trottoir parisien une adolescente qui a eu finalement le courage de se rebeller. Parallèlement, un modeste sous-officier de la Police de la route enquête, plus ou moins à l'insu de sa hiérarchie, sur le meurtre très intrigant de deux jeunes filles, hôtesses de bar employées par la filiale d'un important brasseur néerlandais à la conquête du très lucratif marché nigérian de la bière.
L'une et l'autre vont bien vite se heurter à des puissances de l'ombre, réunissant dans les mêmes cercles influents, affairistes sans scrupules, politiciens véreux et flics « d'élite » aussi violents que corrompus. Heureusement, la société civile se mobilise et sait s'attacher des compétences diverses mais utiles –de l'avocat vedette au mercenaire sud-africain- qui font avancer l'enquête en soutenant la détermination sans faille de l'investigatrice européenne. Dans le même temps le policier nigérian vertueux poursuit sa quête donquichottesque de la vérité et grâce à son expérience et à sa connaissance du terrain, progresse lentement mais sûrement dans l'identification des assassins et de leurs commanditaires.
Merci donc à Martin Ledun d'avoir traité de façon sensible et bien informée un sujet aussi douloureux et de nous faire mieux connaitre ce pays immense et fascinant qu'est le Nigéria. Les amateurs d'intrigues complexes seront peut-être un peu déçus. Sans être manichéen –chacun a ses raisons qui ne sont pas toujours complétement méprisables- le livre est tout de même assez prévisible. le récit est plutôt linéaire et les rebondissements peinent un peu à nous surprendre, ce qui n'appelait pas forcément un pavé de 400 pages bien remplies. Mais l'intérêt documentaire est bien là. Ce roman d'ailleurs entre en résonnance de façon saisissante avec un documentaire de Floriane Devigne récemment diffusé sur Arte (« Juste Charity ») qui montre que dans ces affaires d'immigration clandestine et de proxénétisme les méchants -heureusement- ne gagnent pas toujours, même si c'est souvent les petits poissons qui sont châtiés alors que les gros s'en tirent voire prospèrent...
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