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Critique de Milllie


Casey Han, 22 ans, issue d'une famille pauvre d'immigrés coréens aux Etats-Unis, a toujours travaillé dur, soutenue par ses parents pour se construire une vie plus confortable que la leur. Tout juste diplômée de Princeton, la jeune fille semble pourtant se trouver dans une impasse : contrairement à tous ses camarades issus de familles aisées qui peuvent continuer leurs études à l'étranger, profiter de vacances bien méritées ou intégrer l'entreprise de papa ou de ses amis, Casey est coincée entre ses rêves d'intégrer la haute société new-yorkaise et la dure réalité de ne pas avoir un sou en poche, encore moins quand ses parents la mettent à la porte. Jusqu'où la jeune fille ira-t-elle pour construire la vie qu'elle souhaite vraiment sans renier ses origines ?

De Min Jin Lee, je n'ai toujours pas lu le célèbre Pachinko qui est pourtant dans la liste de mes Pense-Bête depuis longtemps, aussi quand Babelio m'a proposé de recevoir dans le cadre d'une Masse Critique son second roman (qui est en fait le premier par ordre d'écriture !) j'ai sauté sur l'occasion pour découvrir cette auteure. Je dois dire que j'ai d'abord été un peu déroutée par cette famille Han : même si l'écriture est fluide et le style très agréable, nous permettant de nous couler sans effort dans les premiers chapitres de ce joli pavé, j'ai trouvé que l'histoire était très longue à se mettre en place et ai eu au début du mal à comprendre où l'auteure voulait en venir. Il faut dire que le personnage de Casey est d'abord difficile à cerner : drôle de fille, au caractère bien trempé, qui en quelques minutes se fâche irrémédiablement avec son père en lui répondant et en attisant sa colère au lieu d'accepter de se taire, qui est prête à dépenser les dollars qu'elle n'a pas dans des articles de luxe alors que sa vie s'effondre et qu'elle ne sait pas où elle dormira le soir et qui semble si intransigeante, si persuadée qu'elle mérite une vie meilleure, que j'ai au départ eu du mal à l'apprécier ou à la comprendre vraiment. Et puis au fil des pages, son caractère se dévoile petit à petit, on apprend à mieux la connaître et j'ai commencé à apprécier le talent de l'auteure pour brosser des portraits par petites touches, pour sonner juste et créer des personnages complexes qu'il faut justement du temps pour appréhender tant ils ne sont pas de simples caricatures ou archétypes.

Autre point qui a rendu ma lecture un peu compliquée au début : ce roman est très américain dans son contexte et son récit et j'ai parfois eu l'impression de manquer de quelques références culturelles ou connaissances pour apprécier vraiment ses nuances. Les premiers chapitres nous font passer de l'univers des facultés et des Business School américaines à celui des banquiers d'investissements, brokers et autres courtiers et, même si pourtant je lis beaucoup de littérature américaine et l'apprécie, j'ai parfois été un peu perdue pour comprendre soit le système scolaire américain (et ses nuances entre études initiales, diplômes complémentaires, facultés réputées ou non), soit l'univers des grandes banques (et le poste proposé à Casey, bien loin de ce à quoi elle pourrait prétendre avec son diplôme). Heureusement au fur et à mesure que l'on progresse dans la lecture, ces questions deviennent plus secondaires, l'intrigue prend de l'ampleur avec différents personnages qui gravitent autour de Casey et que l'on apprend eux aussi à mieux connaître et la lecture devient petit à petit plus agréable puis totalement passionnante à mesure que je suis rentrée dans le roman. Il ne se passe pourtant pas grand chose dans ce roman, de petites scènes de la vie quotidienne, des couples qui se font et se défont, les amis qui progressent professionnellement et Casey qui continue à se chercher et malgré tout cela sonne totalement juste, comme une chronique un peu désenchantée d'une jeunesse qui s'en va petit à petit, des rêves que l'on poursuit plus ou moins longtemps sans savoir si on les réalisera un jour. L'auteure a beaucoup de talent pour saisir toutes les nuances des relations sociales, tous les non-dits des classes sociales, de la distance qui sépare forcément une jeune fille issue de l'immigration et sans le sou et ses amis descendants de grandes familles bien établies. Ce roman est aussi une très belle et amusante description de la double culture coréano-américaine des descendants d'immigrants comme Casey et de la complexité à concilier deux modes de vie et deux systèmes de valeurs si différents.

La famille Han est donc au final un roman qui vaut totalement le coup de s'accrocher un peu au début pour entrer dans l'histoire : j'ai ensuite été emportée par le récit sensible et juste de l'auteure et j'ai adoré passer toutes ces années avec Casey et ses proches. C'est aussi un très beau portrait d'une jeune femme qui refuse de rentrer dans le moule et d'abandonner ses rêves, croyant à son talent et cherchant sa place pour briller, un personnage auquel je me suis totalement attachée et que j'ai été triste de quitter. Une belle découverte qui me convainc (encore plus) qu'il me faut vraiment plonger bientôt dans Pachinko !
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