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Critique de Papyrusdunil


Ce gros roman de 600 pages est un véritable voyage, la saga d'une famille coréenne dont les membres traversent, sur plusieurs générations, les aléas de l'histoire de ce petit pays dont finalement, nous, occidentaux ne savons pas grand-chose… Quelques clichés entretenus par les médias lorsqu'ils évoquent sa moitié nord, une dictature féroce complètement fermée dirigée par le rejeton d'une dynastie de sinistre réputation, les Kim, et pour l'autre moitié sud, un pays ultra moderne, habité par des coréens disciplinés et studieux très en avance sur les technologies numériques, et apparemment mieux préparés que nous à faire face au covid !!
Mais, ce que sont ces gens, ce qu'ils ont traversé avant la scission de leur pays, la colonisation japonaise de leurs terres, l'oppression, la seconde guerre mondiale, la menace chinoise, la détestation du Japon, tout cela est pour la plupart d'entre nous, totalement méconnu.
Cela commence un peu comme un roman de Pearl Buck. Dès les premiers chapitres, le dépaysement est garanti. On est immergé dans un monde inconnu, peuplé de pauvres paysans, ou de pêcheurs, subissant une domination Japonaise très âpre, où les vies précaires se déroulent lentement, au rythme des saisons… le lecteur pénètre l'univers de Sunja, fille unique d'un mariage arrangé, qui devra bientôt s'expatrier au Japon pour pouvoir assumer une grossesse non désirée après avoir épousé un pasteur volontaire pour la sortir de l'impasse et adopter le bébé.
Décrire l'histoire familiale qui va se dérouler sur 600 pages et 80 années ne présente à mon avis aucun intérêt. Comme dans toutes les sagas de ce type, on suit l'évolution des uns et des autres, pénétrant les relations intra-familiales qui se complexifient au fur et à mesure que s'enchaînent les chapitres. Il faut se laisser embarquer...
L'intérêt de ce roman réside principalement dans le fait que son auteure y dépeint touche à touche, la complexité de ces deux cultures, si proches et pourtant si lointaines, cette incroyable ségrégation que les japonais imposent aux coréens émigrés, les cantonnant aux tâches les plus viles comme la lucrative pègre des jeux et ses salles de Pachinko. Elle montre combien la rigidité japonaise est aujourd'hui encore un frein absolu à l'intégration de ces populations autrefois contraintes à quitter leur pays exsangue, mais jamais intégrées. Elle nous montre avec finesse et sensibilité, les difficultés à survivre dans un pays profondément xénophobe et arque-bouté sur des rigidités ancestrales pour une diaspora coréenne née au Japon finalement contrainte au retour en Corée du nord, du sud ou à l'exil en Amérique, tant le racisme les ostracise. Un peuple déraciné, apatride… Après la lecture édifiante du dernier roman d' Olivier Adam, dont le thème est le déni de parentalité dans le cas des couples mixtes séparés, cette saga apporte un regard acéré sur un autre aspect peu glorieux de la culture nippone.
Ce roman explore également des événements de la seconde guerre mondiale vus du Japon mais aussi dans le regard des coréens immigrés, contraints d'adhérer à la politique jusqu'au-boutiste nippone et de participer à l'effort de guerre. Enfin, l'auteure y aborde également la place de la religion chrétienne et des persécutions subies par les croyants au pays du soleil levant.
L'histoire familiale, ses croyances, ses traditions, se déroule sur huit décennies.
Je dois dire qu'il arrive qu'on s'y perde un peu en raison du nombre grandissant de personnages. Leur diversité dilue l'intérêt du lecteur et nuit au fil conducteur du récit qui a tendance à s'essouffler sur sa fin.
Il y a pour moi 100/150 pages de trop qu'il aurait sans doute fallu condenser.
Mais malgré cela, ce roman est une belle découverte, bien écrit, avec des détails extrêmement réalistes qui en font un voyage littéraire marquant que je recommande.

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