Ce tome 20 intitulé "L'Astrologues de Bruges", et paru en 1994, reprend certains éléments des tomes précédents que Roger Leloup n'avaient pas développés jusqu'à présent. Il reprend l'idée du laboratoire alchimique du Moyen-Âge, mais associé au thème du voyage dans le temps... Autant à première lecture j'avais carrément kiffé, autant à seconde lecture je reste médusé...
Dans une Bruges magnifiquement reconstituée (qu'elle soit du XXe siècle ou du XVIe siècle), l'artiste Jos sert de ficelle pour amener Yoko là où l'auteur veut l'amener le plus rapidement possible dans le sacro-saint carcan des 48 pages... On a d'un côté Yoko qui ne sait rien de ses adversaires, et d'un autre côté ses adversaires qui semblent tout savoir d'elle : nous somme dans les paradoxes temporels, et Yoko va devoir remonter le temps à l'aide de Monya (qui malheureusement ne sert que de convoyeuse spatio-temporelle), ce qui va provoquer les événements qui devaient l'amener là où elle devait aller ! Même si ce n'est pas aussi bien exploité que dans "La Patrouille du temps" de Poul Anderson, c'est suffisamment bien exécuté pour être intéressant. Et pour ne rien gâcher l'auteur maintient aussi longtemps que possible la frontière entre Fantastique et Science-Fiction...
C'est à mi-parcours que la belle mécanique se grippe : le Diable explique à Yoko tout ce qu'elle doit savoir de manière fort peu naturelle, on ajoute non pas un mais deux MacGuffins qui ne servent à rien du tout, un whodunit qui ne sert à rien du tout lui non-plus, et alors que le background reste dans le vague les incohérences coupables se multiplient de manière éhontée... C'est clairement du gâchis ! La peste soit du one-shot de 48 pages !!!
Pour les lecteurs avertis les choses sérieuses comment ici...
Le récit aurait pu et aurait dû tenir en 2 tomes ! La Team Yoko débarque à Bruges en 1545, et Roger Leloup évoque sans avoir les couilles de les nommer les Guerres de Religion entre Pays-Bas catholiques et Pays-Bas protestants : nous sommes dans les Guerres des Flandres... (qu'attendre d'autre de l'auteur qui a attendu la fin de la Guerre Froide avant d'oser nommer la CIA et la KGB ?) Il aurait fallu développer tout ce background avant de parvenir au Diable tenant plus de l'Héphaïstos grec, du Vulcain romain et du Mime germanique que du Grand Satan... Là on aurait eu un chouette cliffhanger des familles !
Alors si j'ai bien compris, on a un agent du Vatican qui lâche le châtiment divin de la peste sur les communautés n'ayant pas juré fidélité à la vraie chrétienté pour les obliger à revenir dans le giron de la papauté... Excellente idée, sauf que contrairement au "Couvent des damnées" cela n'est jamais expliquée !!! (et c'est pitié qu'un héritier d'Hergé qui se doit de bien se documenter qualifie la peste de maladie virale et non de maladie bactérienne !)
Si Torcello est vraiment un agent du Vatican qu'a-t-il besoin d'autant de paravents pour agir, et s'il n'est pas agent du Vatican pourquoi il se complique autant la vie pour parvenir à ses fins ? Parce qu'il utilise l'artiste Jan van Laet et le scientifique Balthazar pour monter un trafic de reliques, qui alimentent un marché de bijoux finement ouvragés, qui au final alimente une traite des blanches, qui lui-même sert à financer ses travaux sur les armes de destruction massive... Là franchement, le coup de l'astrologue Zacharius qui est mort et empaillé mais qui est remplacé par Torcello lui-même c'est capillotracté ! Mais ce n'est pas fini... Balthazar séquestré ne fuit pas bien que Yoko lui en offre l'opportunité (cela aurait pu être par esprit de vengeance, et expliqué par 1 ou 2 phylactères bien pensés : oui mais non !), pour des raisons que la raison ignore Torcello essaye de le buter avant de lui extorquer ses secrets... du coup il recherche notre sémillante héroïne à travers les siècles pour récupérer lesdits secrets, donc il est très con car :
1) il n'exploite pas le secret de l'immortalité qui lui aurait rapporté beaucoup d'argent...
2) il recherche un arme bactériologique après l'invention des armes bactériologiques...
3) depuis le début, il s'est embarrassé de l'artiste Jan van Laet pour des prunes !!!
Je ne suis pas un hater à la con, donc voici mes propositions :
Yoko remonte le temps pour comprendre pourquoi Torcello lui en veut autant... Et en remontant le temps, elle résout l'énigme du faucon borgne et du joyau surnommé l'Oeil de Satan (qui ici ne sont que des MacGuffins à la con), offrant ainsi à son ennemi la pierre philosophale lui octroyant une immortalité lui permettant de multiplier ses crimes de siècles en siècles (genre les complots des tomes 7 et 14), obligeant ainsi Yoko à voyager de nouveau dans le temps pour contrer les actions du méchant qu'elle a créé...
Roger Leloup n'a jamais su transformé son serial en feuilleton, et là encore il a magistralement loupé l'occasion d'offrir à son héroïne un méchant récurrent... Car comme vous le savez une bonne histoire a cruellement besoin d'un bon méchant !
Par contre l'auteur n'oublie pas le devenir de son comic relief, en lui offrant à travers le personnage de Mieke une dulcinée transtemporelle qui va servir de maman aux petits et aux grands enfants de la Team Yoko !
Commenter  J’apprécie         305