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Critique de colimasson


Plus risible que les femmes qu'il dénigre (« La race est chose très importante chez la femme, de même que chez les chevaux »), Pétchorine figure le modèle d'un héros de notre temps –à condition que « héros » se confonde ici avec « bouffon ». La comparaison est implicite, elle ne tardera toutefois pas à se révéler au fil des différentes parties qui constituent ce roman.


Les points de vue autour de Pétchorine s'enchaînent ainsi pour constituer un portrait morcelé, qu'il faudra reconstituer au-delà des failles chronologiques et des doutes véridiques que nous inspirent la narration des témoins invoqués. L'imbrication des récits ne permet pas toujours de faciliter la compréhension des événements lorsqu'elle n'empêche pas carrément de suivre correctement le déroulement de l'histoire. le roman, rabiboché de bric et de broc, semble avoir été composé dans l'hésitation, comme si Lermontov, ne sachant pas quel point de vue choisir pour décrire Pétchorine de la manière la plus convaincante, avait finalement décidé de garder tous ces brouillons et de les unir par un fil conducteur qui convainc surtout par son caractère artificiel. le thème des amours désillusionnés, de l'individualisme naissant d'une génération, de la quête existentielle impossible à mener sans l'illusion d'une gloire proche, semblent hanter Lermontov qui développe ici les mêmes thématiques que celles qui apparaissaient déjà dans la Princesse Ligovskoï, qu'il avait commencé à rédiger quatre ans auparavant sans réussir à en achever la rédaction. le héros porte d'ailleurs le même nom –pour un peu, il aurait suffi que la Princesse Ligovskoï trouve une conclusion pour que son histoire constitue un nouveau volet des aventures d'un Héros de notre temps.


Bien sûr, l'écriture enchante par son ton mordant, ses descriptions acerbes et sa verve ironique, et il n'est pas déplaisant de lire six fois de suite la variation d'une même histoire –mais il faut quand même avouer que dès la troisième redite, on commence à espérer une évolution du personnage de Pétchorine. Ce n'est pas le cas et le vaillant guerrier de l'amour, séducteur par fatalité plus que par désir, reste buté du début jusqu'à la fin. S'il s'agit d'un autre des ressorts comiques déployés par Lermontov, il entraîne toutefois davantage de désagréments que de véritables réjouissances. le bouffon rigolo vire en ennuyeux chantre du désenchantement et ne parvient même plus à convaincre de l'inanité des passions terrestres. Autour du personnage de Pétchorine, la perfection aurait été atteinte si Lermontov avait su allier l'unicité du récit de la Princesse Ligovksoï à la possibilité d'une conclusion à la manière d'un Héros de notre temps.

Lien : http://colimasson.over-blog...
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