AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de motspourmots


Il y a des livres indispensables. Celui-ci en est un et il n'est pas trop tard pour prendre connaissance de ce témoignage aussi essentiel qu'implacable. Alors que s'achèvent les cérémonies du souvenir à l'occasion des soixante-dix ans de la libération des camps d'Auschwitz, le récit de Primo Levi est là pour rappeler ce qu'il ne faudrait jamais oublier.

"Si c'est un homme" est le journal de captivité de l'auteur, déporté en tant que résistant en février 1944. le récit des onze mois passés dans l'un des camps de travail d'Auschwitz, dans des conditions que l'on n'ose même pas imaginer. Publié en 1947, ce n'est que bien plus tard qu'il suscitera l'intérêt et la considération qu'il mérite.

Si ce témoignage est tellement essentiel c'est qu'il est l'un des rares à avoir été livré si tôt, quand de nombreux survivants ont mis des années avant de pouvoir ne serait-ce que parler de leur captivité. L'auteur explique qu'il avait commencé à tenir ce journal "là-bas", écrivant et brûlant aussitôt les quelques phrases rédigées en cachette. Il dit aussi s'être efforcé de le livrer sans passion, en adoptant la position du témoin plutôt que celle de la victime.

C'est cette position qui donne sa force au texte, exposant les faits, racontant la lente marche du temps, observant l'humanité déserter peu à peu les êtres privés de leurs attributs humains. Primo Levi raconte onze mois de vie ou plutôt de survie, le système d'guidé par l'instinct de survie, la nécessité de comprendre l'organisation du camp pour tenter de préserver la moindre étincelle, non pas d'espoir mais de "moins pire". Il observe les comportements d'êtres traités moins bien que des bêtes, niés dans leur identité et dont la seule préoccupation est d'arriver à tenir debout malgré le froid, la faim, les épidémies favorisées par des conditions d'hygiène atroces. Et d'échapper aux "sélections", synonymes de disparition par l'énorme conduit de cheminée que l'on aperçoit de loin.

"La conviction que la vie a un but est profondément ancrée dans chaque fibre de l'homme, elle tient à la nature humaine. Les hommes libres donnent à ce but des noms bien différents, et s'interrogent inlassablement sur sa définition : mais pour nous la question est plus simple. Ici et maintenant, notre but, c'est d'arriver au printemps."

Par cette expérience, Primo Levi a eu accès à l'observation de la nature humaine dans ce qu'elle a de plus extrême, de plus instinctif. Il n'a quasiment pas rencontré de SS dans le camp car le système était conçu pour "tourner" avec une hiérarchie établie parmi les différentes catégories de prisonniers. Mais il a pu "apprécier" toute l'efficacité de cette terrible machinerie ; par des échanges de regards, de mots, de coups. Des comportements définitivement ancrés dans sa mémoire et qu'il nous livre de façon presque chirurgicale.

Un témoignage fort, un constat terrible sur ce que l'homme est capable de faire à d'autres hommes. A lire absolument.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
Commenter  J’apprécie          400



Ont apprécié cette critique (38)voir plus




{* *}