Ne pense pas que je t'aime
parce que je regarde ton visage ;
beaucoup vont à la foire
pour voir, et n'achètent rien.
Dans la solitude des champs
je m'en allai pleurer ma peine,
et je pleurai si longuement
que fleurirent toutes les herbes.
Pour que je puisse t'oublier
il faudrait qu'il y ait
diligences par les mers
et barques sur les chemins.
J'ai une douleur, je ne sais où,
née de je ne sais quoi ;
j'en guérirai je ne sais quand,
si me soigne je ne sais qui.
Peine et ce qui n'est peine,
tout est peine pour moi,
hier de ne pas te voir,
aujourd'hui de t'avoir vue.
Hier tu m'as dit aujourd'hui,
aujourd'hui tu m'as dit demain,
et demain tu me diras
que l'envie t'a passé.
Les étoiles du ciel
n'y sont pas au complet,
car ma belle en son visage
garde les deux principales.
Jusqu'à mes soupirs
qui sont plus heureux que moi;
ils s'en vont et je demeure;
ils s'en vont et moi pas.
Volant de bouche en bouche
un chant atteignit ma maison,
et du miel qu'il portait
laissa une goute en mon âme.
Si je savais quelles pierres
mon amour foule dans la rue,
je les mettrais à l'envers
pour que personne ne les foule.