p.419.20.
- Vous et mon frère êtes faits décidément dans le même bois ! Vous complotez contre moi pour me ruiner, et quand votre manœuvre échoue, vous m'en faites reproche comme si c'était moi qui avais voulu vous nuire. Vous êtes aussi pervers que des inquisiteurs.
Annetje arriva alors avec les bols de café. Hannah sentit l'odeur et l'eau lui monta à la bouche à l'idée de goûter de nouveau à cet élixir. Plus encore que son parfum, elle adorait l'effet que ce breuvage avait sur elle. Si elle avait été une érudite, elle aurait été capable d'élucider le moindre point obscur de la Torah ! Si elle avait été marchande, elle aurait surpassé en intelligence tous les hommes de la bourse ! Voilà qu'elle pouvait de nouveau porter ce liquide à ses lèvres, savourer son amertume délicieuse. Le café était comme Miguel, songea-t-elle : aigre-doux et irrésistible.
"Il était quelque peu mystérieux que cette ville soit devenue, depuis un demi-siècle, le centre du commerce mondial, attirant en son sein les marchands de tous les grands pays. Amsterdam n'était d'ailleurs pas même une véritable ville; les Hollandais se plaisaient à dire que Dieu avait créé le monde, mais que la Hollande avait créé Amsterdam. Une cité construite sur des marécages, équipée d'un port hasardeux ou seuls les pilotes les plus expérimentés parvenaient à manoeuvrer (et encore, non sans risques), qui ne possédait aucune richesse locale, hormis le fromage et le beurre ... et pourtant, grâce à l'opiniâtreté de ses habitants, Amsterdam était devenue le phare du monde marchand."
p.225.
Mon lecteur se demandera peut-être pour quelle raison je lui narre cette anecdote. La réponse, c'est qu'elle met parfaitement en lumière l'animosité viscérale qui existe entre ces deux hommes, une rivalité qui remonte à l'enfance et qui, autant que je le sache, est totalement sans fondement. Mais telle est la situation dans cette fratrie.
Parido, finalement, donna à la fille cent florins et la chassa de son logis. Lienzo put de nouveau marcher dans les rues de Vlooyenburg sans craindre l'assaut des grands-mères et des enfants. Mais une nouvelle inquiétude avait remplacé l'ancienne. Si Parido apprenait que Lienzo était derrière cette infamie, sa vengeance serait sans pitié.
p.242-3.
- Je n'ai pas le temps d'entendre votre colère. Je veux savoir d'où provient l'argent. S'il ne vous vient pas de votre mari, alors qui vous l'a donné ?
Elle lâcha un petit rire puis se couvrit la bouche.
- Oh, il vient de mon mari, c'est sûr ! Ce rustre de son vivant, me besognait comme un butor, se souciant uniquement de son plaisir, jamais du mien. Et maintenant qu'il est mort, ce salaud me baise encore de la même façon !
Ses yeux se plissèrent, et un voile de haine assombrit son visage.
- Il m'a laissé un peu d'argent, mais une misère comparée à ce qu'il m'a fait endurer.