Ce recueil de Liu Xinglong est comme un bel hommage à la terre. Certains, obligés de vivre dans les campagnes lors de la Révolution culturelle l'ont vécu comme un exil, lui a retenu de cette expérience une belle opportunité de se familiariser avec un peuple dénigré mais qui a tout à faire de ses mains. En découle ce petit recueil de trois nouvelles, toutes centrées sur ce petit peuple qui a pourtant de formidables ressources.
On se place donc du point de vue des paysans qui résistent à l'urbanisation avec leurs frêles moyens. C'est ainsi qu'on est embarqué dans un Comité de quartier où tous se concertent pour s'organiser collectivement devant la menace de la modernité. de la même manière, tous se mobilisent pour dessiner la statue qui ornera la mythique route des Vieilles Lunes. Et enfin la dernière nouvelle met en lumière tout le loufoque que peut constituer les passages piétons pour tous ces paysans qui voient débarquer les codes de la ville dans leur petite bourgade isolée.
L'humour dont recèle ce recueil est assez salvateur et j'avoue avoir emprunté le livre justement pour pointer toute l'austérité imposée lors de la Révolution culturelle mais c'est en fait un condensé d'observations futées et habilement formulées. On se croirait dans une plaquette remake des Lettres persanes à la mode asiatique. le quotidien "moderne" à la sauce paysanne passe comme une lettre à la poste et on se surprend à dénigrer toutes les avancées de la société bien futiles pour les peuples reculés. Et l'humour et la formulation sont évidemment à souligner tout autant que la très bonne préface qui situe bien le contexte de la fiction.
Un tout petit livre, à retenir pour se familiariser avec la Chine lointaine, en phase de transition vers cette désormais bien connue (et quelque part fatale) modernité.
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Au matin du quatrième jour, Hu (le Hu "made in Ailleurs", comme on l'appelait), le Chef du Comité de Quartier, s'en vint avertir chaque famille, que, l'après-midi même, il serait procédé, sur la Route des Vieilles Lunes, à l'identification subséquente des coupables...
Tout Chef qu'il fût, Hu savait bien qu'il y a pot et pot, qu'un pot à thé n'est pas un pot de chambre [...]
Il était du genre plaisantin : par exemple, lorsqu'une femme était contrainte au curetage pour se trouver enceinte au-delà du nombre des grossesses autorisé par la loi, il trouvait drôle de dire "qu'elle allait se faire dégonfler la chambre à air.
Olivier Barrot présente : "Du thé d'hiver pour Pékin".