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Critique de jongorenard


Une promenade érudite, sensible et pleine d'amour pour nos amis ailés où se mêlent des récits d'expéditions ornithologiques et des détours tout aussi ornithologiques dans l'Histoire et dans les arts. Passionné depuis l'enfance par les oiseaux et leur place dans la culture humaine, Stanisław Łubieński nous décrit dans "Le parti pris des oiseaux" son profond amour ornithologique, les dangers liés à un tel engouement, les enjeux du développement humain sur la vie aviaire ainsi que l'inspiration que les oiseaux peuvent exercer sur les hommes. L'ornithologie, comme toute passion, a ses inconvénients. J'ai appris par exemple que l'un d'entre eux, le BCD (Birding Compulsive Disorder), est une maladie qui peut conduire un ornithologue au volant d'une voiture à freiner soudainement sur l'autoroute parce qu'il a repéré un spécimen intéressant dans une prairie ou alors à faire « taire tout le monde d'un chut, un doigt pointé dans la direction d'où lui parvient un bruit intéressant. » En général, cependant, les effets secondaires de l'ornithologie se manifestent de manière douce : se promener la tête en l'air et l'oreille aux affuts, soigner un oiseau blessé, compter un groupe de passereaux, baguer des migrateurs et inoculer tranquillement sa passion à ses proches. Stanisław Łubieński le fait d'une manière raffinée. Il ne nous fait pas oublier qu'il regarde les oiseaux non seulement avec des yeux naturalistes, mais aussi humanistes. À côté des textes très personnels qui racontent ses expériences d'ornithologue, les oiseaux deviennent alors une source d'inspiration pour écrire sur l'art, la littérature, le cinéma. C'est pourquoi, dans son livre, la bergeronnette d'un poème de Kapuściński, les outardes, les grues ou les cigognes des peintures de Chełmoński rencontrent les moineaux de son quartier sans oublier des remarques ironiques ou de bon sens (« Les outardes sont des oiseaux très craintifs. Comment Chełmoński a-t-il réussi à s'en approcher ? »), des reproches à Mickiewicz pour son ignorance des rapaces ou des regrets à l'égard d'Hitchcock qui a choisi dans un film les oiseaux pour illustrer « le sentiment que la réalité peut se retourner contre nous. » On y trouve également d'excellentes histoires, composées de manière dramatique, sur l'ornithologue américain James Bond dont le nom a été emprunté par Ian Fleming pour son célèbre agent secret ou une autre sur Friedrich Tischler, un ornithologue allemand qui a vécu jusqu'en 1945 en Mazurie sous la forme d'une enquête journalistique. J'ai beaucoup aimé toutes ces histoires autour de l'ornithologie. Mais il y a plus dans ce livre que des récits d'expéditions ou des références culturelles intéressantes. L'écriture de Łubieński est telle que vous vous sentez proche de l'endroit où il se trouve. Il peut être installé dans une botte de foin en train d'observer une volée de grues et vous vous sentez avec lui. Il peut réfléchir au mythe de la création de la cigogne, voir s'il peut encore trouver des nids dans la campagne et vous cherchez avec lui. Son style élégant penche légèrement vers la fiction, mais reste dans les limites appropriées à une prose qui colle à l'observation et j'ai pris plaisir à lire une langue aussi belle. Comme peu d'autres dans la littérature, Łubieński écrit sur son environnement avec expertise et amour. L'attention fervente qu'il pose sur les détails, les formes, les bruits, les odeurs ou les couleurs nous offre un regard presque sacré sur le monde. Qu'on soit ornithologue, amoureux de la nature ou simplement curieux, je recommande chaudement la lecture de ce livre.
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