Citations sur L'été infini (15)
Dans vingt ou peut-être trente ans ils seront toujours là, disséminés de par le monde, tels des vestiges, des traces de vie, de cette sorte que l’on peut dérouler dans une simple phrase froissée mais qui en vérité peut mettre plusieurs décennies à s’achever.
[…] elle ne pardonnait rien à personne, la douleur et le chagrin étaient dissimulés au creux d’un ici et maintenant qui chez elle durait bien plus qu’un instant et se déversait dans un monde illimité par lequel elle se laissait engloutir, avec lequel elle fusionnait, qu’elle habitait entièrement […].
[…] et que cette flemmardise chez lui est fatale car elle est en vérité l’indolence même : il n’a envie de rien, rien de rien, même la vie, ça lui pèse.
Non, c'est certain, dit la mère, mais que veux-tu, les individus sont comme ça. Dans ce cas je ne veux plus être un individu, dit la fille.
Non, c'est certain, dit la mère, mais que veux-tu, les individus sont comme ça. Dans ce cas je ne veux plus être un individu, dit la fille.
Vient le printemps puis l'été, "l'été infini" comme ils disent, ils l'évoquent ainsi à croire qu'ils l'invoquent, "l'été infini" à croire que le langage et non les hommes crée le monde, ces hommes qui ne peuvent exister sans langage.
Et si l'histoire porte jusqu'à nouvel ordre les accents d'un rêve.. cela s'explique par le fait que la vie est un rêve, un rêve dont on ne se réveille jamais mais qui un beau jour s'avère brusquement évanoui depuis des lustres ; et pour autant vous êtes toujours ici...
Et, pendant ce temps, au cimetière, le garçon jadis si bien bâti gît sous trois cuillerées de terre dans son cercueil au fond de la fosse. Ici, la voix peut se poser et trouver le repos, dans la mort, qui est le centre de gravité vers lequel elle n'a cessé d'être attirée et autour duquel elle a enlacé ses lignes: Tu es né de la terre, tu retourneras à la terre, tu te relèveras en mots de la terre.
Ils demeurèrent le reste de la soirée et toute la nuit dans le grand salon, devant l'âtre vide, froid, sombre. Il ne fallu guère de temps au cadet puis à l'aîné des deux petits frères pour s'endormir et poser leur tête sur chacune des cuisses de la mère. Lorsque la fille demanda à une unique occasion la permission d'aller aux toilettes, le beau-père introduisit la clé dans la serrure et déverrouilla la porte, non sans indiquer à la mère que si elle aussi voulait y aller c'était maintenant, mais celle-ci secouant la tête pour seule réponse, il reverrouilla la porte et suivit sa belle-fille jusqu'à la plus proche des seize salles de bains munies de toilettes où il fit le planton devant la porte, d'ailleurs davantage avec l'allure d'un factionnaire armé ou du portier d'une discothèque post-soviétique, et, lorsqu'elle en ressortit il la laissa le précéder jusqu'au grand salon dont à nouveau il déverrouilla et reverrouilla la porte pour ensuite glisser la clé dans sa poche.
Ses mouvements sont fluides et assurés, et non des tentatives pour être quelqu'un; il est, tout simplement, et il est une incarnation lucide de la fierté que, sans l'avoir jusque -là rencontrée, on reconnaît comme étant celle qu'un pays ou sans doute plutôt une culture peut avoir.