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Citations sur Pour la beauté du geste (15)

La maison était entourée d'une voie ferrée. On entendait les trains qui souvent ne marquaient pas l'arrêt dans la ville. Pas d'arrêt, rien que la vitesse, et le bruit de la vitesse. Le bruit de la vitesse des trains qui me secouait et m'empêchait de dormir. Les parents pensaient que la nuisance sonore allait être un problème pour vendre la maison un jour. Moi, je pensais que ces passages dans un fracas de bruit métallique étaient un plus, il fallait juste trouver où ils se prenaient ces trains qui ne s'arrêtaient pas chez nous. Ils passaient plusieurs fois par jour, parfois trois, parfois quatre, sans jamais s'arrêter.
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Alors j'ai décidé d'écrire sur cet instant, bref et violent qui change tout, qui modifie les perspectives, celui où pour la première fois on se retrouve face à face avec la beauté. Celle qu'on ne reconnaît pas tout de suite, qu'on n'imaginait pas si rugueuse, qu'on ne voit qu'une fois qu'on lui a tourné le dos. Elle ne ressemble pas du tout au portrait-robot qu'on en avait fait. Elle n'a pas de belles couleurs, elle n'est ni douce, ni soyeuse, elle n'a pas de longs bras qui enlacent et de longues mains qui caressent. Elle fait du bruit, écorche les tissus et ne veux pas être exposée.

Écrire. Revenir sur les plaies pour donner à voir les merveilles sur lesquelles elles ouvrent. Écrire pour ouvrir le champ, élargir les définitions et révéler les différences de terrain, refuser le nivellement.
Ce qui est le plus beau dans la beauté, c'est peut-être la cruauté qu'elle demande parfois pour être touchée du doigt. Tout se paie.
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La maison était entourée d’une voie ferrée. On entendait les trains qui souvent ne marquaient pas l’arrêt dans la ville. Pas d’arrêt, rien que la vitesse, et le bruit de la vitesse. Le bruit de la vitesse des trains qui me secouait et m’empêchait de dormir. Les parents pensaient que la nuisance sonore allait être un problème pour vendre la maison un jour. Moi, je pensais que ces passages dans un fracas de bruit métallique étaient un plus, il fallait juste trouver où ils se prenaient ces trains qui ne s’arrêtaient pas chez nous. Ils passaient plusieurs fois par jour, parfois trois, parfois quatre, sans jamais s’arrêter.
Il y a pourtant toujours une gare, ...
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Je me gare devant la maison, baisse un peu le son de l'autoradio, pose le menton sur le volant et regarde le ruisseau qu'a formé la pluie sur la route en pente. J'ai pris l'habitude ces derniers jours de marquer des temps d'arrêt dans mes journées, pas la force de les vivre d'une traite. La pluie rend ici le paysage encore plus misérable qu'il ne l'est. Ici, la pluie n'a aucune poésie.
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Quand j'ai pensé aux courses, j'ai pensé au dîner, au moment du dîner qu'on allait devoir prendre ensemble, à nos places autour de la table de la cuisine. Tu n'en as jamais changé. Moi non plus. En face de toi. Comme ça, tu pouvais voir ce que j'avais dans mon assiette, me dire que c'était trop, que j'étais déjà assez grosse comme ça et cracher dedans pour ne pas que je la finisse.
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Il s'était planté devant le plat, avait sorti les mains de son pantalon et déchiqueté la moitié du rôti avec les doigts. Il portait à la bouche des morceaux de viande et les recrachait dans son assiette. C'est dégueulasse ! Qu'es-ce que je vais bouffer, moi maintenant ? Il avait parlé. Il avait essuyé ses doigts sur son pyjama et était retourné devant la télévision. Avait encore monté le son.
Tout de suite après, il y avait eu les larmes de la mère. C'est pas grave maman, moi je le trouve bon ton rôti. Elle lui caressait la tête, ça va passer maman.

(p. 78)
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Le plus dur, c'est de ne pas regarder la pierre en face du trou, le marbre vieux rose et d'un cruel mauvais goût. Un autre nom y est gravé, en doré. Celui de ma mère morte. La vue de ce nom me ferait me fendiller de la tête aux pieds comme un vase chinois. Non seulement tu ne lui as pas donné la chance de connaître la vie sans toi mais en plus, tu vas la rejoindre pour l'éternité. La pauvre, c'est long l'éternité. Depuis combien d'années tu avais payé pour avoir ce trou ? C'est toi qui as tout organisé, bien sûr. Le seul voyage que tu lui auras offert.
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Je suis toujours une locomotive lancée à grande vitesse qui traverse une petite ville désertée mais qui ne s'arrête pas, avec au-dessus de la tête une maison démodée dont personne ne voudra et dans le bas du dos, un passage à niveau démoli, remplacé par un souterrain qui sent la pisse. Mon autoportrait.
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Regarde celui-là, c'était ton préféré. Il est là, il est venu dire au revoir à tonton. Il pose la main sur mon épaule en signe de réconfort et s'essuie les yeux qui ont l'air vraiment humides. Il a toujours été parfait. A débuté sa carrière de saint dès sa naissance. A tout de suite affiché la couleur. Né le jour de la fête des mères, dimanche 28 mai. Même le jeté de sa robe est superbe, un mouvement ample et délicat. On dirait qu'il a répété. Je pense que les autres se retiennent d'applaudir. Et celui-là, regarde, tu ne l'as jamais aimé. Il faut dire que s'il n'y avait eu que des gens que tu avais aimés, vous n'auriez pas été nombreux. Ça m'aurait évité un aller-retour an train.
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La dernière fois que je me suis trouvée devant cette stèle, il n’y avait qu’un nom, le mauvais. Ce n’est pas ce qui était prévu. J’aurais dû lui faire promettre de ne pas me laisser seule avec toi. Je n’aurais jamais imaginé te balancer une rose sur la tête avec deux noms gravés sur le bout de marbre, trente ans que tu nous disais que tu n’en avais plus pour longtemps. Et ce jour-là, tu étais encore là. Bien droit sur tes bottines à talonnettes. Tes bottines à talonnettes que j’entends encore résonner sur le carrelage parce que j’ai grandi avec elles, du moins j’ai essayé. Ce jour-là, c’est toi qui étais au bord du trou, moi je n’ai pas pu. J’étais ivre et mon amoureux me tenait à bout de bras, j’étais rentrée dans le bar à côté de l’église. Un dernier et j’y vais. Encore un dernier et j’y vais. Allez, le dernier et j’y vais. Ce jour-là, je n’avais pas de lunettes, je n’ai pas regardé la boîte descendre dans le trou, je n’ai pas pu. Je n’ai pas distribué de roses non plus, chacun est venu avec la sienne. Il y avait beaucoup de monde, la tête me tournait et mon ventre était en train de se déchirer. Je plaquais mes mains dessus. J’ai vomi. Après, plus aucun souvenir. Je crois que je me suis évanouie. Les pompiers sont venus me chercher et je me suis réveillée à l’hôpital.
Je n’ai plus de roses. Ce n’est pas grave, il n’y a plus personne. Ou encore quelques curieux que tu ne connaissais même pas et qui ont fait de ton voyage leur promenade de l’après-midi. J’ai prévenu tout le monde que je ne resterai pas après. Ta sœur a commandé quelques bouteilles de vin, de jus d’orange pour les enfants et quelques quiches en guise de pot de départ. J’ai payé. Il paraît que le champagne, ça ne se fait pas dans ce genre d’occasion, dommage je serais peut-être restée. Ils attendent tous à l’entrée du cimetière, c’est sûr. Je veux juste qu’il y en ait un qui me conduise à la gare.
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