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Critique de LightandSmell


Surprise, agréablement surprise. À eux seuls, ces quelques mots pourraient résumer mes impressions une fois la dernière page tournée. En ce moment, j'enchaîne les thrillers, et je dois dire que celui-ci rompt clairement avec les codes. Il serait d'ailleurs presque dommage de cantonner cet ouvrage à un seul genre, l'autrice nous offrant une histoire tout en subtilité.

Attristée par la décision unilatérale de rompre de son amant, Adèle se lance à coeur perdu dans une enquête afin de lever le voile sur l'inconnue de la Seine, un terme presque poétique pour désigner le cadavre non identifié d'une femme repêché dans le fleuve. On est loin du glamour parisien bien que l'amour, sentiment indissociable de la Ville Lumière, soit ici présent. En filigrane, sans être intrusif, mais comme une toile de fond dans laquelle Adèle se noie. L'eau comme fil conducteur à moins que ce ne soit la peau…

Cette peau que la journaliste a décidé de marquer et d'embellir. Son envie de tatouage, ce n'est pas un caprice soudain ou une envie spontanée, mais un projet mûrement réfléchi. Alors son tatoueur, Oscar Ortiz, elle a pris le temps et le soin de le choisir ! À moins que ce ne soit le travail de l'artiste et sa vision très personnelle, quasi mystique de son art, qui ne l'aient choisie elle. Cet homme dégage une telle aura de mystère et un tel charisme que, comme Adèle, on ne peut s'empêcher de ressentir une pointe d'admiration et une certaine fascination pour lui. Artiste accompli, il ne se contente pas de reproduire des images sur un corps, il les imagine et les implémente avec précision et une totale dévotion… C'est peut-être sa faculté à ne faire qu'un avec la peau de ses clients qui fait de lui un si bon observateur des tourments de l'âme.

Il arrive ainsi à cerner le trouble qui enserre la poitrine d'Adèle. Il faut dire qu'en plus d'une rupture qui l'a profondément meurtrie et déstabilisée, l'enquête de l'inconnue de la Seine touche beaucoup plus la journaliste qu'elle ne le devrait. Une sorte d'identification à la victime s'opère en elle, bien que Jérôme, policier et amour de jeunesse, essaie de lui faire garder les pieds sur terre. Enfin, quand il n'est pas obnubilé par l'idée de la reconquérir ou qu'il ne doit pas faire face à ses propres démons !

Plus que l'enquête qui passe ici au second degré, c'est bien la psychologie des personnages qui revêt ici un intérêt particulier. L'autrice nous offre, en effet, des personnages complexes, voire torturés, qui ne pourront pas vous laisser indifférents. À ma grande surprise, ce n'est pas Adèle qui m'a le plus touchée, mais un autre personnage dont on découvre progressivement toute la délicatesse et la fragilité. Certains chapitres laissent ainsi entrevoir les fêlures qui se sont créées et creusées au fil du temps et des rejets. En plus de rendre le personnage intrigant, cela soulève certaines réflexions à la portée quasi philosophique…

Devient-on un monstre parce que tout le monde nous traite comme tel, l'est-on par le poids de l'hérédité ou ce que l'on qualifie de monstre n'est parfois, ni plus ni moins, que ce meurtrier que chacun d'entre nous porte en son sein ? Une question plutôt dérangeante que l'on est amené à se poser à mesure que l'on avance dans l'intrigue et que l'étau se resserre autour d'Adèle. Entre pertes de mémoire, malaises, doutes et questionnements, la journaliste oscille entre folie et réalité jusqu'à ce qu'un dramatique événement va, d'une certaine manière, la (re)mettre sur le chemin de la vérité…

Sans tomber dans un inutile et dérangeant sensationnalisme, Armèle Malavallon n'épargne pas ses lecteurs prenant des décisions radicales quand cela sert le récit. Éprouvant pour le coeur, mais terriblement efficace tout comme sa très jolie plume qui apporte beaucoup de cachet et de chaleur au récit. On nous plongeant d'emblée dans la vie et l'esprit de son héroïne, l'autrice instaure une certaine connivence avec les lecteurs. Se dégage donc des pages une ambiance que j'aurais envie de qualifier d'intimiste. le récit aborde des thèmes parfois difficiles, et la vie d'Adèle est pour le moment chaotique, mais les lecteurs sont complètement absorbés par les pages sans arriver à prendre de distance. Je n'ai ainsi pas ressenti beaucoup d'empathie pour Adèle, car bien trop différente de moi, mais j'ai vécu les événements à ses côtés sans aucune réserve…

En conclusion, Dans la peau est un roman prenant et immersif qui, sous prétexte d'une enquête, nous plonge avec brio dans la vie d'une journaliste dont on apprend à connaître les forces et les faiblesses. Original et intéressant notamment par les thèmes abordés, il offre également une petite incursion du côté d'un art que je connais peu, mais qui mérite ici toutes ses lettres de noblesse, le tatouage. Bien plus qu'une histoire de meurtre à élucider, c'est aussi le récit d'une vie à mener avec le poids des souvenirs, des mots, des regrets, et de nos actes…
Lien : https://lightandsmell.wordpr..
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