Se guidant aux sons des cris et des aboiements, elle parvint à la pister, évitant de justesse un stand de cacahuètes et une collision avec deux cyclistes. Elle venait de tourner dans une rue quand elle vit une queue disparaître à travers les portes automatiques...de l'hôpital.
- oh non ! Gémit-elle. Pas là...n'importe où mais pas là.
À bout de souffle, elle s'élança. Le fait même d'imaginer Fluffy à l'intérieur lui donnait envie de rentrer sous terre. Un sol glissant était loin d'être l'idéal pour les grosses pattes d'un jeune chien pataud. Elle craignait le pire. Elle grimpa les six marches du perron à la hâte, se rua dans le hall d'entrée et s'arrêta net, pétrifiée. La vision d'apocalypse qui s'offrait à ses yeux dépassait ses pires craintes.
-Je t'ai dit que tu étais très belle aujourd'hui?
La tête légèrement penchée de côté, elle sourit.
-Tu veux savoir si, aujourd'hui, tu m'as dit que j'étais belle?Ou si tu m'as dit que j'étais belle seulement aujourd'hui?Parce que , vois-tu, ce n'est pas la même chose.
A sa grande surprise, il s'adossa à sa chaise et éclata de rire.Un rire sonore et chaleureux qui l'inonda d'un sentiment de bien-être.
Quand il se redressa, il avait l'air détendu.Rajeuni.
-Tu es très belle tout le temps et je ne pense pas te l'avoir dit aujourd'hui.J'en profite aussi pour te dire que j'ai de la chance d'être avec toi.Tu es une femme extraordinaire, Montana Hendrix.
Elle se sentit rougir.
-Je ne faisais que plaisanter, murmura-t-elle, gênée.
-Et moi je dis la vérité.
Pendant qu'elle parlait, la petite chienne le fixait de ses yeux sombres, plus foncés que ceux de Montana, la truffe tremblotante, frissonnante de tout son corps.
- Elle est malade? s'inquiéta-t-il.
Montana se mit à rire.
- Non! Enfin pas de la façon dont vous l'entendez.
Elle chuchota quelque chose à l'oreille du caniche qui lui lécha le menton.
- Elle a le béguin pour vous, expliqua-t-elle.
- Quoi?
-L'amour n'a pas grande importance, dit-il.J'en ai parfois été témoin.
Se levant à son tour, elle le regarda bien en face.
-L'amour est la seule chose qui compte dans la vie.
Il savait que c'était faux .Il n'avait jamais ressenti d'amour pour personne, et il ne s'en portait pas plus mal.
Il était plus simple de garder ses distances, de se poser en observateur.Plus simple et plus clair.Et moins douloureux.
Il avait assez souffert dans les premières années de sa vie pour vouloir tenter de nouvelles expériences.
-Tout le monde veut avoir des racines quelque part, insista-t-elle.
-Non.Toi tu veux des racines.Moi je suis un nomade.
J'ai choisi de soigner les autres partout dans le monde.
-Est-ce un choix ou un devoir?
-Quelle importance?
A son regard voilé de tristesse, il vit qu'elle avait enfin compris que sa décision de partir était irrévocable.
-Je ne veux pas te faire de peine, murmura-t-il.
-Trop tard!
[...] Je t'ai aimée au premier regard. Tu es ce qu'il a de meilleur en moi. Tu es ma lumière et, sans toi, je suis aveugle... [...] (p341)