AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de kuroineko


Désolée par avance pour mon mauvais jeu de mot; La Montagne magique de Thomas Mann a été mon Everest pendant des années. le livre est présent dans ma bibliothèque depuis tout ce temps et revenait régulièrement comme un remord face à mon manque de courage. le pire est que ce ne sont pas les presque mille pages qui m'effrayaient. Mais l'impression de n'être pas à la hauteur de l'oeuvre.

Janvier 2019, j'ai enfilé mon sac à dos et mes chaussures de rando pour enfin entamer l'ascension jusqu'au Berghof. C'est d'ailleurs d'entendre parler aux infos de la rencontre annuelle de Davos qui a emporté ma décision puisque le sanatorium se trouve un peu plus haut que Davos-Platz et Davos-Dorf. Malgré mes appréhensions, j'ai très vite accroché au récit et à l'écriture dense, riche et détaillée de Thomas Mann.

Le jeune Hans Castorp, la vingtaine aisée et nonchalante, se rend pour trois semaines au sanatorium du Berghof pour visiter son cousin Joachim Ziemssen, apprenti officier obligé de soigner ses poumons atteints dans cette station huppée.
Outre la description des rituels et emplois du temps du centre de cure, l'auteur dresse le portrait détaillé de plusieurs de ses pensionnaires, certains hauts en couleur, ridicules ou pitoyables du fait de leur état moribond. le médecin et son assistant valent également le détour, le premier usant d'un langage rude et tonitruant à tout bout de champ.

Vu l'épaisseur du volume, ces descriptions laissent beaucoup de place à l'introspection, à des réflexions nombreuses et variées. Sans compter les discours du littérateur humaniste italien, le signor Settembrini.
Le contraste entre les deux cousins est saisissant. Si Joachim est d'un sérieux presque rigide quant à ses soins, afin de pouvoir repartir plus vite vers "le pays plat", Hans, lui, se laisse porter nonchalamment par le rythme singulier du sanatorium. Chaque jour étant plus ou moins identique, les semaines et les mois défilent comme une seule et même journée, semble-t-il. Les notions de temporalité et d'atemporalité sont d'ailleurs au coeur du roman, démontrant la relativité du temps et l'incapacité pour Castorp à saisir la notion de durée "ici en haut". La montagne de Thomas Mann est en effet magique de ce point de vue, plus que par la réussite de ses vertus curatives.

Bien que souvent rabroué, avec force arguments, par Settembrini qui l'a pris sous son aile de pédagogue, Hans est un jeune homme dont le caractère tend vers une certaine morbidité, accréditant la maladie et a fortiori la mort, d'une dignité et d'une noblesse que l'Italien réfute à grands cris au nom de la vie. Il engage d'ailleurs le jeune Allemand à quitter au plus vite le sanatorium et à débuter sans délai sa carrière d'ingénieur maritime. Sous son verbiage et ses airs souvent pompeux, Settembrini n'en est pas moins bon juge de la personnalité du "visiteur".

Nombre de concepts et sujets sont encore abordés dans La Montagne magique, tels que la théologie, l'anatomie, la politique, la souffrance de l'humanité, la littérature, etc. Et l'amour bien sûr, le sanatorium étant mixte, toutes sortes de rencontres sont possibles. Hans ne manque pas de le découvrir à son tour... Je vous laisse plonger dans le récit de Thomas Mann pour en apprendre plus là-dessus.

Je me sens très satisfaite d'avoir entrepris - et terminé - cette lecture. Et encore plus d'y avoir pris plaisir et de m'être délectée de nombreux passages. Beaucoup m'ont donné matière à réfléchir car la philosophie n'est jamais très loin des pages de ce roman. Maintenant que Herr Mann ne me fait plus peur, je pense poursuivre la découverte de son oeuvre avec Les Buddenbrock. Finalement, c'est toujours le premier pas qui coûte.
Commenter  J’apprécie          7420



Ont apprécié cette critique (61)voir plus




{* *}