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Critique de Xapur


Elle qui chevauche les tempêtes (très joli titre qui détourne l'original : Windhaven en anglais), se situe sur une planète recouverte d'eau, sur laquelle s'est écrasée il y a des siècles une nef stellaire. A partir de ses voiles, faites en une matière quasiment indestructible, les colons survivants ont taillé des ailes qui leur permettaient de se déplacer rapidement, grâce aux vents nombreux et puissants, entre les îlots qui parsèment la surface. A l'époque du récit, il ne reste que des légendes sur cet âge passé, sur les guerres fratricides qui ont suivi et mené à deux castes distinctes : les rampants, vivant au sol sur leurs îles en un système quasi-féodal, et les aériens, messagers ailés et caste supérieure dont l'aîné hérite à sa majorité des ailes de son parent selon une loi immuable. le récit se situe donc dans un atmosphère de « very low SF », celle-ci n'étant là que pour expliquer l'origine des fameuses ailes sources de toutes les convoitises. Car un volant qui disparaît en mer emporte avec lui une paire d'ailes dont le stock diminue alors, ce qui pénalise toute la société. Les aériens sont en effet des messagers, et à ce titre égaux aux seigneurs des terres, tandis que les voyages en bateau sont dangereux et assez peu fréquents, et qu'il n'existe pas d'autre moyen de communication.

La jeune Mariss, fille de rampant, est adoptée par un aérien et, dotée d'une grande maîtrise voire d'un don inné, se révèle une excellente pratiquante. Jusqu'au jour où son père adoptif décide, en application de la loi, de lui retirer les ailes qu'il lui prêtait et de les donner à son fils biologique. Celui-ci est bien peu doué et a peur de voler, de plus il préférerait être barde, métier pour lequel il est vraiment doué. Mariss va donc déclencher un conseil réunissant les volants et les inciter à se poser des questions sur le mérite individuel et sur les dons ou la maîtrise, plutôt que sur la généalogie. Bien sûr, cette évolution n'est pas au goût de tout le monde et comme tout système, toute loi, elle a des effets pervers que la suite du récit explorera. Notamment avec le personnage très antipathique (et un brin caricatural) de Val Une-Aile. On est alors dans une époque où les aériens peuvent être défiés et perdre (ou regagner) leurs ailes lors de concours annuels, et où des écoles permettent aux jeunes, notamment rampants (sacrilège !), d'apprendre à voler pour tenter leur chance au concours. Val profite du système et s'attire les inimitiés de tous lors du gain de ses ailes, mais la loi l'autorise à les garder. Faut-il respecter celle-ci à la lettre ou la tordre quand on estime que quelqu'un exploite le système ? Faut-il aider ceux qui poussent pour aller encore plus loin ou revenir à l'ancienne loi ? Les questions sont difficiles et les réponses parfois ambiguës.

Dans la troisième partie, Mariss est victime d'un accident de vol et se retrouve clouée au sol. Lorsqu'une aérienne enfreint la non-ingérence de sa caste, ou qu'un seigneur s'en prend à ces êtres réputés intouchables, la femme désormais mûre va devoir s'impliquer avec réticence. Mais difficile pour elle de se résoudre à une existence de rampant, quand bien même celle-ci lui apporte l'amour au passage, alors qu'elle a chevauché les tempêtes. Sera-t-elle capable de couper les ponts, de renier son passé ou un lien inaltérable s'est-il forgé malgré le rejet dont elle fait désormais preuve, puisqu'elle ne vole plus ? A moins que son expérience n'en fasse un pont entre les deux communautés ?

Il y a du Ursula le Guin, voire du Jo Walton, dans Elle qui chevauche les tempêtes. Une belle ambiance, un monde dangereux, des peuples déchirés entre des lois anciennes et un besoin d'évolution, de belles interrogations et des personnages bien campés. Et la longue saga de Mariss, que l'on suit de son enfance à sa toute fin, en fait un récit poignant et passionnant.
Lien : https://bibliosff.wordpress...
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