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Critique de sandra_etcaetera


Si on m'avait dit qu'un jour je serais autant passionnée par une histoire scientifique bourrée de neutrons et de mécanique quantique, où l'uranium sert la métaphore littéraire, jusqu'à exercer en moi une déflagration… atomique, je ne l'aurais pas cru.
Bon tout ça c'est encore un peu à cause du cinéma, à cause de Christopher Nolan (il faut bien trouver un coupable à mon appétence subite et insensée pour la fusion nucléaire !)
Le film Oppenheimer avait déjà ouvert la voie à des questions fondamentales et sensibles sur la place complexe du scientifique dans un processus capable d'anéantir une partie de l'Humanité.
Et comme les lourdes questions appellent souvent des réponses nuancées, chez Stefano Massini elles passent par des angles narratifs qui nous laissent suffisamment entrevoir la conscience, la pensée, les certitudes et les nombreux doutes de ces chercheurs juifs hongrois à l'oeuvre dès 1938 aux États-Unis, parce qu'exilés depuis l'avènement d'Hitler au pouvoir et la gangrène des politiques antisémites à travers l'Europe.

Ils sont donc d'abord des juifs errants aux valises plus ou moins déballées, ils sont à l'abri mais inquiets et surtout nostalgiques; une nostalgie qu'ils cachent derrière un humour subtil et malicieux.
Et puis il y a cette réalité qui va les occuper et les préoccuper jour et nuit, une réalité qui dépasse ces esprits rompus exclusivement aux particules, aux neutrons et autres équations, loin de la politique.
Sur le plan international le temps presse, la menace nucléaire exercée par les chercheurs dirigés par les SS pousse les États-Unis à prier les physiciens hongrois d'accélérer le rythme de leurs essais, quelques soient leurs états d'âme.
Voilà le paramètre qu'un scientifique rigoureux ne maîtrise pas…
L'Histoire et la course au nucléaire sont en marche et écrasent leurs cas de conscience pacifistes. Il faut agir avant que le « barbouilleur » nazi ne fasse joujou le premier avec la bombe…

Ils s'appellent Leó, Jenö, Ed ou Robert et ils ont le monde entre leurs mains; alors c'est forcément un peu lourd à porter…

Dès les premières lignes, j'ai su que ce texte serait à la fois une révélation littéraire et d'une profondeur à l'ampleur rare.
De vers libres en leitmotivs, de paraboles prophétiques en métaphores scientifiques, d'un humour yiddish irrésistible à l'horreur pudiquement évoquée, de boucles narratives (géniales!) en références bibliques, il se joue là une des plus grandes tragédies de notre Temps.

Manhattan Project, c'est l'union de la science et de la poésie au service d'un texte humaniste et puissant. La lectrice que je suis exulte et en redemande encore !
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