Le Ministère du faste

La République se réapproprie la pratique du pouvoir mise en place sous le Second Empire, elle qui, dans ses premières années, doit composer avec une population encore largement favorable à la monarchie, ou du moins à ses valeurs. Le faste maintenu autour du chef de l’État est compréhensible par l'ensemble de la population, des classes populaires aux classes dominantes.

Du faste impérial au faste républicain

Cependant, les républicains ont été pétris pendant près de vingt ans du cérémonial impérial et ils en ont constaté l'efficacité auprès de la population. Ainsi les codes mis en place sous l'Empire sont-ils réinvestis par les présidents de la République. Les chasses présidentielles sont issues de la vénerie impériale et la garde républicaine, qui accompagne le président et orne les palais nationaux, est l'héritière des cent-gardes, création efficace pour donner une image prestigieuse du pouvoir. La République fait donc elle aussi le choix du faste.

La République, héritière du faste impérial

L'institution curiale est présentée comme l'ennemie de la République, le vestige archaïque d'un système politique qui conduit à la défaite. Le contraste entre l'Empire et la République est renforcé par l'importance accordée à l'apparence du pouvoir : la redingote noire a remplacé le costume chamarré. La République se doit d'être en rupture avec le régime qu'elle vient de renverser, tout comme Napoléon III fut en rupture avec la monarchie de Juillet et la Deuxième République.

La République, héritière du faste impérial

Il ne s'agit cependant pas de rejeter l'accumulation de richesses, fondement du capitalisme dominant, mais la question du luxe se pose quand il est associé au pouvoir politique [...]. Pour nombre de contemporains, y compris républicains, le pouvoir se doit d'être fastueux pour être imposant et les critiques portent sur l'entourage, c'est-à-dire sur ceux qui profitent du faste.

Le luxe de la cour

De son côté, après avoir été le centre des fastes de l'Empire, l'impératrice déchue devient une figure éplorée qui alimente un discours, sinon de compassion, du moins d'émotion. [...] La figure de la veuve endeuillée par la mort de son fils unique parle à l'ensemble de la population au-delà des orientations politiques et de l'appartenance sociale. L'impératrice devient un personnage dramatique que ses anciens sujets suivent au fil de ses voyages.

La niche émotionnelle

La défaite et la chute de l'Empire, à la fois brutal et injuste puisque le plébiscite du 8 mai 1870 avait conforté le soutien populaire à Napoléon III. Le contraste est saisissant entre le déploiement du faste impérial, durant dix-huit ans, et la fin soudaine de l'Empire ; il est propice à la mise en place d'un discours nostalgique.

La niche émotionnelle

Les républicains qui arrivent au pouvoir en septembre 1870 maintiennent le système administratif en place puisque la centralisation s'était avérée efficace. Les services du ministère de la Maison ne disparaissent pas avec la chute de l'Empire mais sont placés sous la tutelle d'un autre ministère.

Servir la République

Le Second Empire participe aux différents formes de domination étatique identifiées par Max Weber : pouvoir charismatique, traditionnel et bureaucratique. Son aspect charismatique en est une composante essentielle car, sans bénéficier de grandes victoires militaires, et au-delà de l'aura de son nom, Napoléon III a su proposer une image de son pouvoir qui s'est révélée efficace dans le rapport autorité-obéissance qui le relie au peuple.

Montrer la politique étrangère de l'Empire

Les critiques proviennent aussi de partisans du régime qui insistent sur le danger d'un entourage éloignant Napoléon III de la réalité du pays. Viel Castel considère qu'à la cour "tout ce monde fait un immense tort à l'Empereur, qui ne connaît que lui et n'a que par lui des rapports avec le monde réel". Cette critique atteint son paroxysme en 1870, quand Napoléon III, méfiant, est poussé par son entourage à déclarer la guerre à la Prusse.

Esprit de cour et influence auprès du souverain

Sous le Second Empire, le cérémonial doit impressionner mais il doit rester accessible pour être efficace. Le personnel de la Maison de l'empereur sert de médiateur, il accompagne les visiteurs, il aide à paraître habitué des palais, il prodigue conseils et recommandations. En ce sens, le port du costume de cour est le reflet de positionnements politiques.

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