AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de BillDOE


Un western qui réinvente le genre, qui fait de la mort un art ultime et des hommes, ses artisans les plus savants.
L'enfant a quatorze ans lorsqu'il quitte la ferme familiale du Tennessee pour le Texas . il ne sait ni lire, ni écrire, il ne s'appelle pas non plus car il n'a pas de nom. Il s'enfuit du monde sordide que ses parents lui ont offert pour tenter sa chance ailleurs, assoiffé de haine et de revanche. Sur sa route, il se laisse enrôler dans une armée de mercenaires commandés par le capitaine White, puis il rejoint une bande de chasseurs d'indiens menés par Glanton et le juge Holden…
L'un des héros principaux, Glanton, a réellement existé. Il s'appelait John Joël Glanton et dirigeait une bande de brigands dont le passe-temps principal était de décimer les tribus indiennes.
Ne cherchez pas l'intrigue, il n'y en a pas. Ce n'est pas une histoire, c'est l'Histoire, celle de la conquête des Etats-Unis d'Amérique à travers les pérégrinations d'un groupe d'hommes à peine moins sauvages que les sauvages qu'ils poursuivent, celle d'un pays qui fixe juste ses frontières terrestres alors que celles de la conscience de ses habitants sont loin d'être établies. C'est un éloge à la cruauté sans limite, au sadisme débridé.
Il y a ce que l'auteur raconte, la violence abrupte, froide, imprévisible et sans concession et la façon dont il le raconte, un style sobre, épuré, propre, une écriture riche d'un vocabulaire étendu que rend parfaitement la traduction de François Hirsch. C'est de la très belle ouvrage d'un point de vue littéraire. Ainsi :
« La nuit venue une seule âme se leva par miracle d'entre les corps fraîchement tués et s'éloigna furtivement à la lueur de la lune. le sol sur lequel il était resté tapi était trempé de sang et imprégné de l'urine des bêtes dont la vessie s'était vidée et il allait, souillé et pestilentiel, fétide rejeton de la femelle incarnée de la guerre. »
Il y a dans le roman de Cormac McCarthy cette opposition entre une violence qui ne connaît aucune limite, « Ils trouvèrent les éclaireurs manquant pendus la tête en bas aux branches d'un paloverde noirci par le feu. On leur avait passé dans les tendons d'Achille des coins aiguisés de bois vert et ils pendaient grisâtres et nus au-dessus des cendres refroidies sur lesquelles ils avaient grillés jusqu'à en avoir la tête carbonisée tandis que leur cervelle bouillonnait dans leur crâne et que la vapeur s'échappait en chantant de leurs narines. On leur avait sorti la langue et elle était maintenue par des baguettes taillées en pointe qui la traversait de part en part et ils avaient été amputés de leurs oreilles et leurs torses avaient été ouvert avec des silex si bien que les viscères leur pendaient sur la poitrine. », et une nature sans commune mesure avec les actes barbares perpétrés, une nature vierge, immaculée, poétique, « Ils grimpèrent tout le jour durant par de hautes prairies peuplées d'arbres de Josué et bordées de pics de granit chauves. le soir des groupes d'aigles prirent leur essor et franchirent le col devant eux et sur les terrasses herbeuses se mouvaient les grandes silhouettes pataudes d'ours pareil à des bovins venus paître sur les landes du haut pays. »
L'auteur accentue souvent l'effet dramatique d'une situation par la répétition de la conjonction « et » dans ses phrases, martelant la narration crescendo vers une issue inimaginable, insoutenable, improbable.
« Méridien de sang » est considéré comme le chef d'oeuvre de Cormac McCarthy et c'est une réalité. L'auteur est avec cette oeuvre l'un des piliers de la littérature américaine.
Traduction de François Hirsch.
Editions de l'Olivier, Points, 419 pages.
Commenter  J’apprécie          700



Ont apprécié cette critique (61)voir plus




{* *}