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Critique de DragonLyre


Mona a seize ans. Tous les étés, en colonie, elle retrouve Liam, son grand amour de vacances. En dehors de cette période, elle s'empêche de penser à lui, même si cela l'éveille de plus en plus à sa sexualité. La troisième année, leur relation franchit une étape significative : ils couchent ensemble au nez et à la barbe des moniteurs. Une première expérience qui ne s'arrêtera pas là pour Mona puisqu'elle se rendra compte quelques semaines plus tard que le coup de la capote qui craque lui a été fatal : elle est enceinte. À partir de là, nous allons suivre son parcours entre famille, scolarité et rendez-vous médicaux. Elle adore les bébés, mais ne se voit pas en avoir un à son âge. Recourir à une IVG lui apparaît vite comme étant la seule solution viable pour elle. Ce n'est pas une décision qu'elle prend à la légère, par peur de… Florence Medina accompagne sa protagoniste dans ses réflexions entre passé, présent et avenir, le tout se mêlant en un chaos prêt à l'engloutir à tout instant. Une décision très complexe à vivre et à gérer, en particulier quand on n'est encore qu'une enfant. À qui Mona trouvera-t-elle la force d'en parler ? À qui demander de l'aide ? Vers quelle structure se tourner ? Autant de questions qui l'assaillent de jour comme de nuit et qui commencent à transparaître sur les traits de son visage, inquiétant cette tante qui peine à mener une grossesse à terme alors qu'elle voudrait tant devenir maman, rajoutant par là-même aux dilemmes de Mona.

J'ai d'emblée été intriguée par la forme de ce roman. Ayant récemment lu un ouvrage young adult – fantasy en vers libres – « La Porte du Non-Retour » – que j'ai adoré, j'étais impatiente de renouer avec cet exercice de style et le ressenti s'est révélé identique. Gros coup de coeur pour ce récit qui déconstruit les codes du genre, joue avec les mots, les retours à la ligne, les rimes, avec une aisance impressionnante sans jamais dénaturer le propos. Un récit qui sort des petites cases, au propre comme au figuré. Une prise de risque de l'autrice et de l'éditeur pour laquelle je ne peux que les applaudir, car je trouve ça tellement rafraîchissant et original ! Mieux encore, ce style donne un ton particulier à Mona qui reflète parfaitement son âge et ses états d'âme, qui le sublime même. Ses phrases, son parler, se fracturent à l'image de ses pensées qui errent et passent du déni (« Juste après les règles, ça ne risque rien« ) au marchandage (Si seulement le fayot pouvait se décrocher de lui-même pendant la nuit, comme ça arrive parfois en début de grossesse…) puisque cette grossesse involontaire sonne aussi la fin de son enfance telle qu'elle la connaissait.

Ce livre s'attaque en chemin à ceux qui cherchent à imposer leur choix aux femmes, qui jugent et rabaissent : « la pilule du lendemain, c'est pour les chiens », leur dictent la manière dont elles devraient disposer de leur corps. Il retrace l'histoire du droit à l'avortement, évoque Simone Veil et le Manifeste des 343, éduquant les lecteur.ices avec sensibilité et subtilité. Une histoire intergénérationnelle, entre femmes, qui recadre la part de responsabilité des hommes tout en les invitant au dialogue, car on oublie un peu trop facilement dans ces cas-là qu'il faut être deux pour procréer.
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