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Critique de myrtigal


«Pour vous, c'est qui le nazi absolu ?» Voilà comment débute le livre et voilà la question posée à Guillaume Meurice dans une salle de la PJ de Paris un matin de novembre.
Deux semaines auparavant, dans une chronique de son émission «Le grand dimanche soir» sur France Inter qui avait pour thème Halloween, Guillaume Meurice évoque le «déguisement Netanyahou», « une sorte de nazi sans prépuce ». Quelques mots, une moitié de vanne, précédée par beaucoup et suivie par beaucoup d'autres, mais qui va être extraite de son milieu et servir de détonateur à l'explosion médiatique d'une ampleur sans commune mesure.
Un livre qu'il a volontairement intitulé dans « l'oreille » du cyclone et non dans l'oeil, car comme il l'a expliqué, être dans l'oeil signifierait être au coeur même de l'événement, emporté par lui, or dans le cas présent, lui se sentait à l'extérieur du tourbillon, comme spectateur de loin. Et c'est donc ainsi qu'il a pu faire le récit sous la forme d'un journal de bord, de ce tourbillon, avec à la fois ce qu'il faut de distance et de recul. le récit de son vécu propre et de tout ce qui s'est passé autour de lui.

Quinze jours donc d'aller-retours entre les bureaux de France Inter, de coups de téléphone incessants, de messages malveillants, du soutien de collègues, de la lâcheté de certains autres, de déplacements et événements annulés, bref un quotidien à la fois comme en attente et accéléré. Mais surtout celui d'un crescendo médiatique affolant, d'abord démarré sur internet par la fachosphère puis — et c‘est le plus affligeant — repris à leur compte par les médias traditionnels métamorphosés en réseau social géant, constat stupéfiant d'un délitement audiovisuel de plus en plus criant. La polémique enflant de jour en jour s'auto-alimentant elle-même mais vide de substance et d'intérêt, puis démultiplié par le défilé d'hommes et de femmes politiques sommé de s'exprimer sur le sujet au micro de toutes les chaînes et toutes les radios dans l'illustration parfaite d'une époque où la réaction doit être permanente pour exister médiatiquement. Sans fond ni nuance.

Loin d'en être atteint ni blessé le moins du monde — ce n'est pas son tempérament —, Guillaume Meurice décrit et décrypte ces évènements avec la décontraction d'un observateur amusé. Il nous livre son regard, son ressenti, du moins ses observations pleine de sens sur l'univers audiovisuel, l'humour, la liberté d'expression, la satire, sans aucune démagogie, car encore une fois il s'interroge avec amusement et malice tout en mettant en exergue les contradictions des personnes qu'il observe. Il laisse ses détracteurs s'égosiller tous seuls, sans céder (même s'il n'aime pas ce mot) ni reculer, en exposant les faits, ayant sa conscience pour lui (et la loi), et ça c'est là le meilleur exemple dont on peut s'inspirer. Ne pas se laisser accabler malgré l'atmosphère actuelle étouffante et saturée, ne pas prendre chaque événement personnellement sinon l'on deviendrait fou.
Guillaume Meurice nous offre ici à la fois un témoignage et un plaidoyer. Un livre qui, s'il est très plaisant à lire grâce à une plume, que je découvre chez lui, drôle, agréable et légère, est tout simplement édifiant sur ce qu'il révèle de notre époque, et même un peu désespérant. Mais comme il le dit si bien :

« Dans quelques années, peut-être que cette ouvrage brillera par sa banalité, devenu un simple exemple parmi des milliers d'un climat de censure devenu la norme. Peut-être y aura-t-il des sujets à éviter et que tout le monde les évitera.
Ou peut-être que ce livre restera un modeste témoignage d'une époque troublée mais à laquelle on aura su, collectivement, faire face pour éviter le pire.»
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