J'ai regardé le plafond, les étoiles au-dessus qui scintillaient, nichées dans les fissures de la roche. J'en apercevais trois à présent, alors qu'elles n'étaient que deux plus tôt. Je les ai regardées clignoter dans le grand noir de l'espace. Je n'avais nul désir de les rejoindre.
-Je suis une « femme », ai-je poursuivi d’une voix lasse. J’en ai ma claque que vous m’appeliez le mille-pattes !
Jared a battu des paupières, interdit. Puis son visage s’est durci aussitôt.
– Parce que tu occupes un corps de femme ?
Wes s’est tourné vers Jared.
– Parce que j’en suis une ! ai-je rétorqué
– Selon quels critères ?
– Les mêmes que les tiens ! Dans mon espèce, je suis celle qui porte les enfants. Ça te suffit comme critère ?
Ça l’a fait taire. Une soudaine satisfaction m’a envahie.
Bien joué ! a approuvé Mélanie. Il s’est comporté comme un goujat.
Merci.
Entre fille, il faut se serrer les coudes.
On ne sait jamais combien de temps on a devant soi .
En quoi ça peut m'aider de vous dire que je vois son visage à chaque fois que je ferme les yeux ? Que je me réveille en larmes parce qu'il n'est pas là ? Que ses souvenirs à elle sont si forts que je ne peux plus les dissocier des miens ?
Cette Terre était à la fois le plus noble et le plus vil des mondes ; on y trouvait les émotions les plus belles, les plus délicates, et en même temps, les pulsions les plus noires, les plus sinistres. Peut-être était-ce inévitable ? Peut-être sans le Très-Bas ne pouvait-on toucher le Très-Haut ?
-C'est un monde étrange, ai-je murmuré, davantage pour moi que pour l'autre âme indigène.
Il a hoché la tête.
-Le plus étrange de tous.
"Que t'attends-tu à trouver de l'autre côté ?" m'a-t-elle demandé alors que nous marchions vers le Styx. "Que vas-tu voir après notre mort ?"
Rien. C'était le mot juste, vide, implacable. C'est pour cela que nous appelons ça "la fin".
"Les âmes ne croient pas en la vie après la mort ?"
Nous avons tant de vies. En vouloir encore une après le trépas, ce serait presque du caprice. Nous vivons une petite mort à chaque fois que nous quittons un être. Et nous revenons à la vie dans le suivant. Si je meurs ici, ce sera ma fin.
-Tu es l'être le plus noble, le plus parfait qu'il m'ait été donné de rencontrer. L'univers sera nu sans toi, a-t-il déclaré.
C'étaient ses mots sur ma tombe, mon épitaphe, et j'étais heureuse de les entendre de mon vivant.
Les Chauves-Souris célébraient leurs morts par le silence : elles cessaient de chanter pendant des semaines, jusqu'à ce que la douleur de ce silence soit pire que celle causée par la perte de leurs congénères.
Pourquoi avoir des scrupules s'il tuait un bébé alien, lentement, en le coupant morceau par morceau puisqu'il n'avait pas de bouche humaine pour hurler ?