Rural noir

Benoît Minville écrit comme il parle. Une écriture de « djeun » percutante, nourrie à la fumette, désaltérée à la bibine des banlieues. Mais une banlieue téléportée dans la Nièvre. Là où les ados respirent l'air vivifiant du Morvan tout proche, bouffent de la chlorophylle, pêchent la truite et le gardon, braconnent en liberté, se baignent dans les eaux cristallines, se baladent sur des vélos déglingués et sont unis comme les doigts de la main. Chris, son frère Romain, Vlad et Julie l'égérie de la bande sont quatre jeunes « paysans » du coin qui profitent de leur région et de leur amitié avec l'insouciance et l'émerveillement de leur prime jeunesse. L'arrivée de Cédric, qui se joint au groupe est un premier accroc dans l'harmonie de ce club (devenu) des cinq. Cédric n'est pas comme eux. Mais il plaît à Vlad. On se balade entre passé et présent dans une guerre des boutons qui a perdu sa naïveté. Les citadins ou plutôt les petites frappes de banlieue ont amené leurs tares, leur insensibilité, leur soif de fric et de pouvoir. La dope, telle des nuages menaçants a étouffé toute la pureté du paysage et de ses jeunes habitants. Ils y perdront leur innocence et même la vie pour l'un d'entre eux. Un superbe roman sur la fraternité, sur la camaraderie, sur la profondeur mais aussi la confusion des sentiments, enfin sur l'orgueil et la brutalité qui prend trop souvent le pas sur l'intelligence.