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Critique de dvall


De ce drame national qui bouleversa le Japon en juillet 1950, l'incendie criminel du Pavillon d'Or de Kyôto, Yukio Mishima tire un roman d'une rare volupté et d'une grande profondeur métaphysique. S'appuyant sur les comptes rendus de presse et de procès de l'époque, l'auteur élabore sa propre interprétation des événements qui conduisirent à cette tragédie culturelle, prêtant sa plume au narrateur de ce récit, l'alter ego romancé du jeune bonze novice qui avoua avoir commis ce crime par « haine de la beauté ».

Ceci est l'histoire d'une inadéquation, douloureuse confrontation entre un garçon bègue de faible complexion et le monde dans lequel il existe. Sa malédiction, outre sa distinction physique, est de n'être jamais compris des autres. Depuis son enfance, son père qui est bonze n'a eu de cesse de le convaincre que le Pavillon d'Or représente le parangon de la beauté. À la mort de celui-ci, le garçon passe sous la protection du Prieur du temple Rokuonji auquel appartient le Pavillon d'Or. Ce sont les années de noviciat et d'études du jeune aspirant bonze qui sont décrites ici, ses amitiés avec deux garçons singuliers chacun à leur façon, sa relation avec le Prieur ou des personnages plus secondaires mais non moins porteurs d'influence. Surtout, il y a le Pavillon d'Or, que le jeune narrateur considère comme le « symbole de l'évanescence du monde phénoménal ». le Pavillon d'Or va devenir tel un moyeu mystique autour duquel tourne l'univers du garçon, sa compréhension du monde, tantôt idéal allégorique tantôt obstacle à sa propre vie.

Mishima explore par la psyché de ce jeune novice des concepts tels que l'altérité et l'esthétique, l'impermanence des choses, la confrontation entre la beauté et la connaissance. D'une plume délicate et imagée, il peint des scènes à la poésie lancinante : le sein blanc d'une femme sorti du kimono et versant un nuage de lait dans le thé de son homme partant pour la guerre, le désir d'une abeille pour le nectar d'un chrysanthème tout entier dévoué à ce désir, la vue nocturne sur la nature depuis le Pavillon d'Or tandis qu'enfle la rumeur d'un typhon… Un roman admirable.
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