Dans le tiroir du mendiant, dans son tiroir secret, qu'il transporte avec lui sous la pluie, dans la nuit, sous les porches d'église et dans les halls de gare, il y a les plans d'une maison. C'est une maison simple et un peu compliquée, dans laquelle il ne mettrait que le strict nécessaire, et aussi, peut-être, un peu de superflu : des vieux journaux, des vêtements trop grands, des livres mensongers et d'autres choses inutiles, parce que sans superflu, ce n'est pas une maison d'homme.
Dans le tiroir du vieux soldat, dans son tiroir secret, il y a un regret tenace. Il y a des souvenirs des temps de guerre et de paix, il y a des objets précieux et des objets sans importance, oui, mais, au milieu de tout cela, il y a ce regret qui ne s'en ira jamais. C'est le regret d'une main tendue qui ne fut pas serrée, une main tendue que le soldat préféra ignorer. C'était la main d'un ennemi qui, avant de mourir, voulait saluer quelqu'un qu'il ne connaissait pas.
et ce n'est pas si désagréable, vous savez, de se sentir un peu quelqu'un d'autre parfois.