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Critique de mylena


Ce livre ne contient qu'un texte, très court, une nouvelle, la seule écrite par Toni Morrison, prix Nobel peu prolixe. C'est l'histoire de deux fillettes qui sympathisent à l'occasion d'un placement provisoire par les services sociaux dans un orphelinat. le lecteur comprend assez vite qu'elles n'ont pas la même couleur de peau. Aucun indice ne vient définitivement convaincre le lecteur de la couleur de peau de l'une ou de l'autre. le truc, expliqué dans la postface, repose sur des a priori culturels. L'inconvénient c'est que même si le texte marche aussi pour le lecteur français, il marche un peu moins bien, et ce n'est pas un problème de traduction. Par exemple, l'histoire n'est pas non plus située dans le temps, le lecteur la situe facilement dans la deuxième moitié du XXème siècle mais seul un lecteur baigné de culture américaine peut le situer avec plus de finesse avec les mentions de programmes télé de l'époque (heureusement il y a une note du traducteur). Et ce qui est plus embêtant, car aucune note ne peut y remédier, c'est que le texte repose sur le même principe avec les a priori sur la couleur de peau : prénom, adresse, travail, logement, voiture, vêtement, etc. Ce n'est pas qu'il n'y a pas d'indices mais qu'ils sont contradictoires, pour la bonne raison que leur lien avec la couleur de peau n'est qu'une probabilité statistique et une question de vécu culturel. C'est un texte quasi expérimental conçu comme « l'expérience d'ôter tous les codes raciaux d'un récit concernant deux personnages de races différentes pour qui l'identité raciale est cruciale ». le lecteur est censé être perturbé par une oscillation incessante pour comprendre laquelle des fillettes est blanche et laquelle est noire, et, impossible de passer outre car c'est un élément majeur dans leur vie et dans leur relation puisque l'histoire repose sur leurs retrouvailles intermittentes et leur perception différente d'un événement qu'elles ont vécu ensemble et qui les préoccupe toutes deux. Il semble que "la plupart des lecteurs blancs estiment que Twyla est blanche, tandis que la plupart des lecteurs noirs la voient noire". Une fois n'est pas coutume, je regrette de ne pas avoir lu la postface plutôt avant ! le texte fonctionne quand même en français (ou plutôt devrai-je dire pour un français, car ce n'est pas du tout un problème linguistique) car on se prend à réfléchir à ce que pourrait donner la même histoire, quels indices ambigus marcheraient. Un texte très fort, « petit mais costaud », qui interpelle et amène à s'interroger au-delà de sa lecture sur les préjugés, les codes culturels, les conventions sociales, ...
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