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Critique de cedratier


« La convocation », Herta Muller (Métaillé 200p)
Hélas ! Je suis passé très à côté de ce roman, qui ne manque pourtant pas d'intérêt au niveau de son sujet. Mais quelle prose inaccessible, pour une prix Nobel de littérature !
Roumanie, aux pires années de la dictature Ceausescu.
La narratrice, « Je » (dont on ne saura jamais le nom), prend le tram pour se rendre à la Nième « convocation » d'un officier de la sinistre Securitate, aussi manipulateur que pervers, jouissant de son pouvoir sans limite. On ne saura qu'au premier quart du livre le motif de ces convocations (ce qui n'est pas très important, puisque le principe de ces régimes policiers c'est de mettre dans l'insécurité toute une population, que chacun se sente coupable, même si on ne sait pas de quoi).
Le récit, minimaliste au possible, se déploie à travers les pensées, les souvenirs plus ou moins autobiographiques, parfois les rêves de cette narratrice, et fourmille donc d'anecdotes souvent sans suite, mais qui dévoilent assez bien et par touches pointillistes une atmosphère, une ambiance étouffante. Ce roman nous fait bien sentir tout le gris d'une vie enfermée, la lourdeur d'un régime policier aussi féroce et menaçant qu'ubuesque dans le quotidien, le climat constant de délation qui peut venir du premier voisin ou collègue de travail, l'absence totale de perspectives pour une majorité de la population qui ne rêve que de fuir de l'autre côté du rideau de fer. A la crainte permanente se mêle la pauvreté, les files d'attente, d'autant que les personnages de ce roman, outre la narratrice, sont des gens modestes, ouvriers, chauffeurs, ou de familles paysannes. Dans cette société déliquescente, on navigue entre l'alcool à très hautes doses, la débrouille individuelle, la bureaucratie malade et kafkaïenne, la dérive mentale qui va jusqu'à l'inceste, le repli (pour ne pas dire la claustration) sur soi.
Mais j'ai eu beaucoup de mal à faire avec une écriture très spéciale, complexe, ennuyeuse. D'abord l'absence de découpage en chapitres nous livre 200 pages sans structure, quasiment au kilomètre, ce qui n'en facilite pas l'accès. Ensuite, Herta Müller change sans cesse de niveau et de modalité d'écriture, passant d'un récit de rêve à un souvenir douloureux, de la description d'une scène dans le tramway d'une banalité déroutante à l'angoisse qui étreint la convoquée face au policier. Parfois, on ne sait plus qui est « Je » qui se raconte, deux ou trois personnages s'exprimant à tour de rôle, d'autant que les guillemets ou tirets censés marquer les prises de paroles sont absents, qu'il n'y a souvent aucun lien apparent entre les situations successives. Plusieurs fois j'ai dû revenir en arrière dans le texte pour comprendre où j'en étais, et parfois sans y parvenir, et j'ai dû me forcer pour aller au bout. le récit est aussi fluctuant que les pensées erratiques de « Je ». Perdu dans cette littérature très particulière, je n'ai vraiment pas aimé cette prose-là, malgré un sujet fort.

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