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Critique de Dandine


Deux personnages importants dans cette histoire. Ou plutot trois: deux hommes en chair et en os, et une femme revee, inventee, et pourtant omnipresente. Trio romantique s'il en fut, et triplet (reussi?) pour Munoz Molina.


Mais commencons par le commencement. Un espagnol americanise (de la tous les anglicismes qui enervent certains lecteurs), prof de litterature dans une minable universite US, doit se rendre a Buenos Aires y donner une conference. A l'aeroport il est happe et accapare par un autre espagnol qui a flaire son origine. Ils n'ont rien en commun. Claudio, le prof, est reserve, solitaire, presque timore. Marcelo est un homme d'affaires extraverti qui le force a ecouter ses souvenirs de Buenos Aires, la merveilleuse aventure qu'il y a vecu quatre ans avant avec une femme, le prototype de la tueuse d'hommes, Carlota Fainberg. Assez enerve au debut, excede par le sans-gene et le machisme de son interlocuteur, passif, notre prof se trouve peu a peu interesse par l'histoire. Fin de la premiere partie.


Une fois a Buenos Aires, Claudio se prend a visiter l'hotel ou s'est deroulee l'aventure de Marcelo, un hotel decrepit, au charme decadent. Il apprend que ladite Carlota a vraiment existe, habitant l'hotel qui appartenait a son mari, mais qu'elle est morte depuis une vingtaine d'annees. Il croit apercevoir son ombre, qui s'estompte des qu'il s'approche. Est-ce un fantome que Marcelo avait aime? Ou tout n'etait que pure affabulation de sa part? Comment lui, specialiste des artifices litteraires, est tombe dans les pieges d'un hableur?


En fait Munoz Molina veut nous faire partager son admiration pour l'art du conteur. Pour lui la "litterature orale" n'est pas forcement un parent pauvre, elle peut etre aussi sophistiquee que l'ecrite. Toutes deux ont pour vocation premiere de tenir l'auditeur/lecteur en haleine, condition sine qua non pour faire passer un quelconque message. Au passage il egratigne les critiques specialises, qui cryptent autant qu'ils decryptent les textes qu'ils etudient, ainsi que les abus du "politically correct", et les surencheres des "gender wars" a l'americaine. Tres rejouissant, tout ca.


Mais je ne place pas ce livre parmi les grandes oeuvres de Munoz Molina, et pas seulement parce qu'il est court. Peut-etre parce qu'il se disperse. Comme s'il contenait deux nouvelles differentes, de deux genres differents. D'un cote la rencontre des deux espagnols, ou l'ambiance de l'aeroport est tres bien rendue, ses bruits, sa musique qui te poursuit, les rumeurs de centaines de passants, et la communication entre eux, impossible mais qui aboutit a une sorte de communion disparate. de l'autre Buenos Aires, le decrepit hotel art-deco, ses longs couloirs obscurs, ses chambres rances de moisissure ou il s'est peut-etre passé quelque chose d'inquietant dans le passé, ou Munoz Molina flirte avec le fantastique. Chaque partie est interessante en soi mais le tout m'a laisse une impression d'ebauche, de piece qu'il aurait du plus limer.


Je reste avec la sensation bizarre que je n'ai eu droit qu'a l'ombre de Munoz Molina. Je retiens quand meme l'hommage a la literature orale, a l'art du conteur. Meme si sur ce theme il vaut mieux lire L'homme qui parle, de Mario Vargas Llosa. Beaucoup plus abouti.
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