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Critique de Iansougourmer


Love & pop me laisse définitivement indécis : si j'ai aimé ce livre, il me laisse un léger sentiment d'insatisfaction, comparé à d'autres livres de Murakami Ryû beaucoup plus enthousiasmants. Cepandant ce court roman ( quelques 200 pages ), reste intéressant et ce à plusieurs titres.

Hiromi fait partie d'une bande de quatre jeunes adolescentes dont le grand centre d'intérêt est le shopping. En dépit de la totale indépendance et des sommes conséquentes que leur accordent leurs parents, les jeunes filles sont insatisfaites car rien ne semble pouvoir assouvir leurs besoins de vêtements et accessoires. Pour obtenir plus d'argent, les jeunes filles utilisent une pratique répandue chez les lycéennes japonaises : par le biais de messageries téléphoniques elles prennent des rendez-vous rémunérés avec des inconnus, allant jusqu'à se prostituer. Hiromi accepte deux rendez-vous rémunérés pour s'offrir une bague, et s'expose ainsi en toute inconscience à de graves dangers...

L'intérêt de lire Murakami Ryû est qu'il est un des rares auteurs contemporains nippons à critiquer aussi durement et systématiquement la société japonaise, vue comme une nation ultramatérialisée où les individus se font broyer par la solitude, la perte de valeurs et la folie, livrés à eux même au sein d'une société japonaise déshumanisée, en déliquescence. Une des illustrations de cette sombre vision du Japon dépeint par Murakami dans ses romans réside chez l'auteur dans la description des relations sexuelles entre individus qui sont un exemple édifiant des relations dénaturées entre individus. Les personnes n'entretiennent plus que des relations vidées de tout contenu sentimental, souvent même de tout sens, qui sont plus le résultat du hasard et de l'obligation d'un échange pour rompre une solitude croissante que de la volonté de découvrir l'autre. En dépit de la densité du tissu urbain, les individus s'isolent les uns des autres.
Ainsi dans love & pop, les jeunes filles n'ont pour seul centre d'intérêt que de dépenser leurs yens pour des articles de mode, même leur relations entre elles semblent plus basées sur des expériences personnelles et un besoin d'agir en bande que sur une amitié solide. le personnage principal, Hiromi, a un petit copain, mais celui-ci semble être plus un passe-temps qu'un véritable amour...
Plus troublant encore, Hiromi et ses amies ne semblent avoir aucun problème à se vendre à de parfaits inconnus, pour acquérir des biens matériels. Et les clients ne semblent avoir eux aussi aucun problème à s'attaquer aux lycéennes et à abuser de jeunes filles de 16 ans... C'est donc le tableau inquiétant d'une société japonaise livrée au matérialisme effréné et à l'immoralité que Murakami fait dans Love & pop.

Toutefois, ce qui fait de Love & Pop un roman particulier dans l'oeuvre de l'auteur est le fait que celui semble vouloir donner quelques sources d'espoir au lecteur. D'habitude le romancier dresse juste un tableau sombre de la société japonaise et laisse un personnage principal e naguère si ce n'est détruit. Ce n'est pas le cas dans Love & pop. En effet, même si on est navré de voir cette bécasse d'Hiromi sombrer dans les joies de l'hyperconsommation, avoir la bêtise d'accepter des rendez vous dangereux et glauques avec des inconnus pour s'acheter une bague puis finalement subir fort logiquement des attouchements sexuels et des violences, le dialogue qu'elle a à la fin de ce roman avec un personnage ainsi que ses réflexions semblent lui dessiller les yeux sur la bêtise de son comportement : même si elle ne comprend pas tout, elle parvient à la vérité salutaire que les plaisirs matériels ne doivent pas être assouvis au mépris de son bien être personnel.
NB : je tiens à mettre en garde ceux qui me lisent : il s'agit là uniquement d'une interprétation personnelle de ma part.

Toutefois, ce qui m'a déçu dans ce roman, c'est sa pauvreté stylistique. On ne trouve ici dans ce roman rien des atmosphères qui mettent d'habitude si mal à l'aise le lecteur, avec un mélange de violence et de psychologie. Pas trace non plus des digressions incongrues et si intéressantes des personnages. Peut être pour accentuer leur côté niais, Murakami ne semble pas avoir aussi bien que d'habitude construit ses personnages principaux. Quant un personnages secondaires, ils font un peu lisses...
La seule chose intéressante de ce roman est le fait que parfois l'action s'interrompt, remplacée par un flot de paroles, messages téléphoniques et publicités. Cela est intéressant dans la mesure ou le lecteur en ressent une impression d'étouffement qui illustre la pesanteur de ce Japon de la surconsommation. Mais lire dix pages de messages téléphoniques peut être un peu lassant...

Un roman de l'auteur en demi teinte, qui si il aborde un aspect du Japon intéressant et méconnu et dénonce de manière efficace les problèmes de la société japonaise, ne parvient pas à garder un rythme soutenu tout au long du livre. Au final, un Murakami Ryû plaisant, sans plus.
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