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Critique de Ana_Kronik


Laure Murat écrit quasiment à chaud sur l'affaire Weinstein. Comme elle le dit elle-même, ce n'est donc pas un essai mûrement composé, mais plutôt une suite de réflexions, de pistes, et de questions dont elle n'a pas forcément la réponse.

Passant en revue le cas Weinstein, mais aussi celui de DSK, de Woody Allen, du blogueur Mehdi Meklat, et autres Bertrand Cantat, elle développe également le point de vue de deux sociétés bien différentes: la française, avec sa réputée galanterie, et l'américaine où prédomine l'approche (faussement?) puritaine, et légaliste. Et pourtant, dans ces deux sociétés, la vision de la femme paraît curieusement identique: elle figure presque toujours comme un objet de désir et une victime de violence, sexuelle ou conjugale. Par ailleurs, le nombres de plaintes qui suivent leurs cours normal devant la justice est très faible dans les deux pays: autour de 5%.

Comment s'expliquer cette culture du viol? Point intéressant, l'auteure cite un conservateur au musée du Louvre: "l'art de l'Occident ne sait parler de sexe que sur un seul mode, la violence" déclare Régis Michel. Et il ajoute: "on demeure stupéfait par l'aptitude des artistes à décliner avec brio un argumentaire aussi funeste. Cette iconographie pulsionnelle a persévéré dans son être, sans altération profonde. On dira sans doute que l'on exagère. À tort. C'est que l'habitude nous rend aveugle".

Effectivement, dans le cinéma actuel on retrouve cette représentation de la domination masculine, qui, comme le montre Laure Murat, ne se limite pas aux block-busters américains, mais se voit aussi dans les films dits "d'auteur" en France. Dans l'imagerie et dans la culture, la sexualité féminine est toujours dépendante des pulsions masculines, et le désir féminin toujours soumis à celui des hommes.

Pour essayer de rattraper les fautes commises par les hommes sur les femmes, le patriarcat ne manque pas de ressources. Orelsan invoque la licence poétique de l'artiste, tandis qu'aux Etats-Unis, on arrose les victimes à coups de millions (cf. le cas Trump). Deux positions qui ne peuvent que paraître hypocrites, et ne semblent pas s'attaquer à la racine du problème.

Ce livre date de 2018. Depuis, de nouvelles révélations sont apparues, avec tout récemment les plaintes de Judith Godrèche, accusant deux réalisateurs-monuments du cinéma français. Il est probablement trop tôt encore pour voir si ces affaires, qui ne "sortent" que parce qu'elles concernent des personnalités connues, arriveront un jour à faire changer le comportement masculin. On peut s'interroger par exemple sur le milieu du sport, dont les entraîneurs et cadres sont bien moins célèbres que les stars de cinéma. La culture ne change que très lentement.
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