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Critique de Presence


Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il regroupe les 5 épisodes, initialement parus en 2020, écrits, dessinés en encrés par Sean Murphy, avec une mise en couleurs réalisée par Matt Hollingsworth. Elle fait suite à Batman - White knight (2018), réalisé par la même équipe, qu'il vaut mieux avoir lu avant. Il contient également l'épisode supplémentaire Batman: White Knight Presents von Freeze, paru en 2020, écrit par Sean Murphy, dessiné et encré par Klaus Janson, et mis en couleurs par Matt Hollingsworth.

En 1685, au manoir des Wayne, le maître de céans Edmond Wayne passe Lafayette Arkham par le fil de son épée, sous les yeux de Bakkar. Il jette son cadavre par une ouverture circulaire et celui-ci tombe au plus profond des grottes souterraines, tout en continuant de rire comme un dément, ses canines de vampire clairement apparentes. Au temps présent, le responsable de l'asile d'Arkham vient ouvrir la cellule de Joker en lui apportant ce qu'il a demandé, bien emballé dans un long sac. Il lui a également apporté les clés de son ancienne cellule. Alors qu'ils descendent les escaliers pour s'y rendre, Joker demande où se trouvent les autres détenus. Ils ont été transférés dans un autre établissement afin que la rénovation de l'asile puisse commencer. Cela fait partie du Projet Napier. Joker s'énerve en entendant ce nom, et exige que le directeur ne le prononce plus devant lui. Finalement arrivé devant son ancienne cellule, Joker prend en charge son long paquet, et poignarde le directeur à la gorge avec son stylo. Au manoir Wayne, Bruce a trouvé l'enveloppe qu'Alfred lui a laissée, et en fait la lecture. Alfred espère que Bruce ne s'isolera pas davantage et qu'il ne coupera pas la communication avec Richard et Barbara. Il ajoute qu'il lui a laissé un coffret sous une lame de parquet de sa chambre. Bruce va l'y retirer et en sort un coffret ancien contenant un journal avec une couverture de cuir.

Batman répond au symbole lumineux de la chauve-souris qui apparaît sur les nuages. Il se rend à l'asile d'Arkham où il est reçu par le commissaire James Gordon. Ce dernier lui apprend l'évasion de Joker, et il évoque la réserve étrange du directeur qui ne répond pas franchement aux questions. Batman interroge à son tour le directeur en l'intimidant et le mettant face à ses contradictions. Il finit par apprendre que Joker a fait une découverte dans sa cellule. Gordon et lui s'y rendent. Ils découvrent une pièce secrète derrière un mur : le fond d'un puits. Il y a un message en lettres de sang sur un mur, trop effacé pour être déchiffrable, et un os humain qui dépasse du sol, indiquant la présence d'un cadavre enterré. Ruth Redford se fait déposer par son chauffeur, à l'entrée de l'immeuble où se trouvent ses bureaux. Elle rentre dans son bureau, une grande pièce avec vue et y découvre Joker assis dans son fauteuil en cuir, avec ses pieds sur le plateau en acajou de son bureau. La conversation s'engage. Dans la batcave, Bruce Wayne explique à Dick Grayson les raisons pour lesquelles il va révéler son identité réelle aux habitants de Gotham.

Le lecteur constate tout de suite qu'il s'agit de la continuation du tome précédent. Il retrouve cette version un peu différente de Batman (Bruce Wayne), de Richard Grayson, de Barbara Gordon du commissaire Gordon, de Joker, de Harley Quinzel, et bien d'autres personnages récurrents de l'univers de Batman. L'auteur en respecte les caractéristiques principales, et aménage quelques caractéristiques secondaires. Ainsi, Joker fut par le passé Jack Napier, Grayson travaille pour une unité spéciale de la police de Gotham sous son identité de superhéros Nightwing, et cette unité a intégré dans son parc de véhicules des Batmobiles. Il est fait référence aux événements du tome précédent, et Batman songe à révéler son identité, comme suite logique desdits événements. La quatrième de couverture permet de découvrir qu'Azrael intervient dans l'histoire, dans une version un peu différente de la continuité (ou des continuités) précédemment établie. À plusieurs reprises, l'auteur réarrange des faits, à commencer par l'histoire de la fondation de Gotham, et l'histoire de la dynastie des Wayne. Il ajoute également au mythe, avec le personnage de Bakkar, le personnage de Ruth Redford, et la mystérieuse Élite de Gotham qui reste dans l'ombre tout en exerçant une forte influence politique.

Il est possible que le lecteur revienne avant tout pour la partie graphique, plus que pour l'intrigue. Sean Murphy est toujours investi dans sa narration visuelle, avec des moments extraordinaires : Edmond Wayne aussi élégant qu'Errol Flynn (1909-1959), Ruth Redford aussi autoritaire que la version initiale d'Amanda Waller, l'épée d'Azrael flamboyante et inquiétante, le transfert des prisonniers d'Arkham avec leur combinaison orange, l'entrain contagieux de Barbara Gordon, quelques course-poursuites dans Gotham toujours aussi réussies, et de beaux affrontements physiques. Les personnages disposent tous d'une réelle prestance, et d'une réelle personnalité visuelle : Batman avec ses cuissardes et sa cape serrée, Harley Quinn et sa silhouette mince, Ruth Redford et sa forte présence physique, Edmond Wayne et son côté pirate élégant, Joker et son exubérance ainsi que son long nez (le seul à avoir conservé un appendice nasal aussi allongé). Déjà acclimaté avec le tome précédent, le lecteur apprécie pleinement la personnalité graphique de l'artiste, ce mélange de traits fins et secs, d'aplats de noir aux contours complexes, d'alternance entre des plans focalisés sur les personnages pour les scènes d'action intenses, et de décors détaillés pour les moments civils ou les séquences de dialogue. Il sait donner vie à chaque personnage, et entremêler des séquences du dix-septième siècle avec celles au temps présent, les éléments gothiques avec la technologie présentant une touche futuriste, des personnages avec une touche romantisme, et une touche de folie.

L'intrigue s'avère rapidement dense sans être trop complexe, avec l'évasion de Joker, l'histoire de la famille Wayne, l'ordre de Saint Dumas, et un secret caché depuis plusieurs siècles, susceptible de faire perdre pied à Bruce Wayne. Dans le même temps, la vie des personnages continue. Bruce Wayne tire les enseignements des événements du précédent tome, et James Gordon fait de même de son côté, chacun arrivant à sa conclusion. Harleen Quinzel doit gérer les conséquences de sa relation avec Jack Napier, ainsi que la disparition de ce dernier. Richard Grayson et Barbara Gordon entretiennent des relations un peu différentes avec l'unité spéciale de la police de Gotham. Ils doivent faire face plus ou moins unis à la fois à Joker à nouveau dans la nature, à la mystérieuse Élite représentée par Ruth Redford, et à l'arrivée d'un représentant de l'Ordre de Saint Dumas doté d'une épée, et jouant les vigilants à sa manière. le lecteur se rend compte que cette fois-ci l'enjeu n'est plus politique, que l'intrigue prime dans la narration. Il peut en être un peu frustré car cette fameuse Élite reste très fumeuse, sans réelle consistance, désincarnée, même pas une caricature d'individus capitalistes. Outre de savoir si Batman et ses alliés pourront endiguer la montée des criminels, le véritable enjeu réside dans la capacité de Bruce Wayne à changer. Sa place en tant que Batman est remise en question. La place de sa famille dans l'histoire de Gotham est remise en question. Sa collaboration avec James Gordon est remise en question. L'héritage de Jack Napier et sa fondation ont plus d'impact bénéfique que ses actions en tant que Batman. le lecteur peut y voir une réflexion sur ce qui fait l'identité d'un individu, ainsi qu'une réflexion sur l'intérêt de l'action d'un individu isolé pour lutter contre le crime. Ces axes sont moins superficiels que l'existence de l'Élite, mais ils ne débouchent pas sur une réflexion sur la nature de l'identité personnelle, ni de l'héroïsme individuel.

Cette suite constitue une aventure de haut vol pour la narration visuelle, la cohérence de l'univers créé, le charisme des personnages créés, avec une intrigue fournie et divertissante, et des thèmes sous-jacents intéressants, même s'ils ne sont pas développés.

Von Freeze : 45 pages, scénario de Sean Murphy, dessins et encrage de Klaus Janson, couleurs de Matt Hollingsworth. Il y a quelques années de cela, Nora fait irruption dans le laboratoire de Victor von Fries expliquant qu'elle ne peut pas accepter son offre d'emploi. Puis un laborantin vient les interrompre pour leur indiquer que Martha Wayne vient de faire un malaise dans la grande salle. Ils se précipitent pour lui venir en aide, et von Fries doit opérer.

Ce tome comprend donc un numéro hors-série pour une histoire qui trouve sa place entre les épisodes 6 et 7 de la première saison. Dans une page d'introduction, le scénariste exprime toute sa gratitude d'avoir ainsi pu travailler avec un des artistes qu'il admire et avec qui il est devenu ami. Janson effectue un excellent travail narratif pour cette histoire se déroulant en Allemagne sous le régime nazi, avec une mise en retenue, très adaptée, dans des tons gris acier. le lecteur en apprend plus sur ce personnage, en découvrant son histoire personnelle, dans un récit qui évite le manichéisme.
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