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Critique de RomansNoirsEtPlus


Même si ce “1794” n'insuffle pas le même souffre que conférait le style brut et inédit que nous découvrions , ébranlés , avec “1793” , ce deuxième volet n'en n'a pas moins la même force et la même intensité dramatique . Une prose sans filtre qui dénonce à travers ce thriller historique une montagne d'injustices sociales criantes .
On y retrouve avec un certain plaisir quelques personnages qui ont éclairé le premier opus comme Mickel Cardell ou Anna Stina .
Si , Cecil Winge ,l'un des héros du premier opus n'est plus là , sa tuberculose ayant finalement eu raison de lui , c'est son frère cadet que Cardell choisit pour l'épauler dans l'élucidation d'une nouvelle sombre affaire . Mais Emil Winge n'a ni l'étoffe ni l'intelligence de son aîné . Éternel étudiant alors que les années passent et qu'il piétine dans sa chambre d'étudiant à tenter d'oublier sa misérable condition en s'enivrant à l'excès de mauvaise liqueur . Cette rencontre avec cet ancien militaire manchot , ce gaillard d'une force incroyable qui détonne à côté d'Emil et sa corpulence de moineau affamé , va changer le cours de sa vie et l'estime qu'il a en sa personne .
L'affaire qui va occuper l'esprit et le corps de nos deux compères les prochaines semaines, c'est la triste histoire de la famille Colling . Tout commence avec cette mère de famille qui va partager avec Cardell sa détresse de la mort de sa fille cadette Linnea Carlotta , décédée pendant sa nuit de noces alors qu'elle s'apprêtait à épouser le jeune héritier du domaine Tre Rosor . Une famille de la noblesse dont le jeune Erik est le dernier descendant , son frère aîné étant mort quelques années plus tôt au combat et son père mort de chagrin quelques mois plus tard .
La version qui a été servie à la famille Colling est qu'une meute de loups avait dévorée Linnea Carlotta .
Un scénario auquel n'a jamais cru Margareta Colling et , alors que sa fille et son mari sont morts , cette quête qu'elle transmet aux bonnes oeuvres de Mickel Cardell , dont le nom a été conseillé par la chambre de Police de Stockholm , est sa dernière tentative pour connaître la vérité sur la mort de sa fille aimée .Une affaire que le colosse au grand coeur ne va pas pouvoir refuser .


On glisse dans ce roman d'une incroyable âpreté grâce à cette écriture sans faille de l'écrivain suédois . On plonge dans l'atmosphère empuantie de la ville entre les ponts , Stockholm , côté lucre poisseux , côté gris sale , où les déchets de toute sorte tapissent les rues étroites et sombres , où l'odeur monte à la gorge , presque insoutenable , celle des excréments jetés sans vergogne par la fenêtre par des habitants pour lesquels l'hygiène et la salubrité publique est le dernier de leurs soucis . La ville des tripots , des auberges sentant le vomis et la mauvaise bière , des voleurs , des mendiants et des prostituées qui tentent de survivre au jour le jour . C'est dans ce théâtre de la misère humaine , que l'auteur , avec son style cru et hyperréaliste, nous décrit la bassesse de certains hommes qui profitent de l'ingénuité de certains de leurs compatriotes pour abuser d'eux et de leur incrédulité .
Le scénario est habilement construit , nous contant en premier lieu l'histoire d'Erik Tre Rosor et son voyage initiatique à St Barthélémy ,alors que les chapitres suivants sont consacrés aux conséquences , en Suède , du périple du jeune homme et de l'affaire qui est liée .
Alors que dans ce monde qui laisse peu de place à la bienveillance et à l'entraide , de nouveaux nés voient le jour grâce à la bonne volonté de quelques âmes humaines non encore corrompues par leur environnement . Une faible lueur d'espoir dans cette société où quelques-uns écrasent le plus grand nombre et où les femmes sont une quantité négligeable si ce n'est à enfanter ou à servir de chair fraîche pour nourrir les fantasmes lubriques d'hommes en quête d'oubli ou d'avilissement .
Un roman passionnant de bout en bout qui vous réservera de belles surprises , quelques moments d'anthologie et un plaisir littéraire rare et intense .
Vivement "1795" !
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