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Critique de Fabinou7


Cet ouvrage semble être le livre d'une vie. Inachevé à la mort de son autrice, soeur de François Ier et reine de Navarre, mère de la protestante Jeanne d'Albret et grand-mère d'Henri IV premier roi Bourbon, il rassemble, sur le schéma initié par le Décaméron de Boccace, pas moins de 72 nouvelles. J'ai tout de suite décidé d'attaquer ce mastodonte par la ruse, à savoir picorer quelques nouvelles au hasard pour « adoulcir l'ennuy » !

Vous l'aurez compris c'est en vieux français, Marguerite, figure de la Renaissance, n'a pas connu les joies de la méthode syllabique en cours préparatoire, et il n'existe pas de version en français moderne, alors une petite aspirine après la lecture et tout ira bien…
L'écriture n'était pas unifiée à l'époque (nous sommes au XVIème siècle), on trouve beaucoup de racines communes avec l'anglais et l'espagnol. L'orthographe d'un même mot peut varier d'une page à l'autre. Rassurons-nous, les bonnets d'âne de la dictée, nous pouvons tout à fait écrire des histoires comme Marguerite dans un français pas châtié !

J'ai été très surpris par la liberté de ton des protagonistes narrateurs qui échangent sur la conduite des personnages des histoires qu'ils se racontent à tour de rôle. Notamment les relations hommes-femmes. Il me manque sans doute la compréhension d'ensemble (n'ayant pas lu l'intégralité du livre) mais je trouve la longue nouvelle d'Amadour et Floride très parlante. D'un côté l'attirance grandissante de l'homme et de l'autre la volonté de s'en tenir à la promesse initiale de chasteté de la femme.

Les choses dérapent et c'est par la ruse que la femme tentera d'échapper aux insistances de son amant devenu agresseur. On entre dans les eaux que certains et certaines voudraient troubles du désir, simplement déjà à l'époque, rappelons un principe simple : quand on dit non…bah c'est non.

Ce que le pauvre amant éconduit ne semble pas prêt à accepter ni respecter. du côté de la jouvencelle, persuadée par des siècles de judéo-christianisme, que céder soit synonyme de déshonneur, on en vient à s'interroger sur l'existence même de désirs charnels...

Mais assez d'anachronismes avec cette nouvelle qui fait doucement sourire et relativiser sur « l'évolution » des moeurs. Marguerite de Navarre, conteuse inépuisable (l'oeuvre aurait dû faire 100 nouvelles) se met en abîme elle-même comme personnage d'une de ses nouvelles en Mère Justice.

Les relations entre les sexes sont également contées sous l'angle de l'hypocrisie du clergé, omniprésent dans des histoires impayables et (déjà) scandaleuses qui poussent là encore à mettre en perspective la critique de la religion et du clergé qu'on pense historiquement plus récente qu'elle ne l'est.

Avec quelques siècles de recul on s'aperçoit, comme le dit bien Fanny Ardant, que l'humain, dans ce qu'il a de plus primaire, c'est-à-dire les sentiments, n'évolue pas.
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