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Critique de Bobby_The_Rasta_Lama


"Le merveilleux est toujours beau, il n'y a même que le merveilleux qui soit beau."
(A. Breton)

Il n'est pas difficile de classer ce livre, mais expliquer de quoi il en retourne va être une tâche ardue. Breton était l'ami de Nezval, et il serait sans doute mieux placé pour vous en parler; je vais au moins essayer...

V. Nezval est un représentant du "poétisme", ce courant surréaliste typiquement tchèque. Je n'ai jamais pu saisir la différence exacte entre les deux, mais si vous voulez un poète surréaliste tchèque pur et dur, prenez K. Biebel. L'imaginaire de Nezval est plus léger, à une exception près... et c'est cette courte prose sur la merveilleuse semaine de la jeune Valérie, hantée par les cauchemars sanglants de sa transformation en femme.

A cause de certaines créations comme "Twilight" ou les suites "officielles" de "Dracula" de Dacre Stoker, je pensais être dégoûtée à tout jamais par tout ce qui touche de près ou de loin à la thématique des vampires. Mais "Valérie" est un vieux bouquin en noir et blanc (1935, sorti en 1945) et Nezval fait partie de mes poètes favoris. Donc, je lui fais confiance, quand il avoue d'avoir écrit "Valérie" : "par amour du mystère qui est à la base des vieux contes, des superstitions et de tels livres romantiques composée en caractères gothiques...", car ça me va tout à fait.
On sent bien l'influence du roman gothique anglais (notamment du "Monk" de Lewis), des vieux grimoires, des Penny Dreadful, des récits de la chasse aux sorcières, des légendes et des contes de fées des plus terrifiants.
Tout ça pour aboutir à une sorte de fantaisie surréaliste érotico-onirique délicieusement aberrante. Au point de se demander avec quel "psilocybe bohemica" Nezval a agrémenté son omelette, le soir où il a pris sa plume.

Valérie est une belle fille de dix-sept printemps qui vit avec sa mamie. C'est à partir de là que l'histoire se corse, car mamie est une vampire, et plutôt que confectionner des confitures et tricoter des écharpes, elle manigance des combines pour priver Valérie de sa jeunesse. Tout cela parce que son ancien amant, le connétable à tête du putois, est de retour en ville, et contrairement à elle, il n'a pas pris une ride. Pas étonnant que la vielle dame ait envie de rajeunir !
Il y a aussi le jeune Orlik, dont Valérie ne sait pas que c'est son demi-frère, ce qui met un soupçon de souffre incestueux dans l'histoire. Sans oublier le missionnaire libidineux qui veut brûler Valérie comme sorcière, quand elle repousse ses avances.
L'histoire commence par un vol de boucles d'oreilles et de poules dans un poulailler, et tout ce beau monde change souvent d'identité, en évoluant entre la place du village, la maison, la cave, et ledit poulailler.

C'est délirant et étrangement beau, pour faire écho à Breton... et en même temps, parfois on s'ennuie un peu. Finalement, cette histoire d'une vieille malédiction familiale, du Putois Parlant et des bibilles magiques d'invisibilité fait vraiment penser aux romans gothiques avec leur lot de clichés horrifiques.
La fin est peut-être un peu trop positive pour moi, mais il est à l'honneur de Nezval de ne pas perdre son temps avec des futilités. Il n'essaie pas de justifier qu'un putois parle, il se fiche éperdument de quelle marque sont les tabliers de mamie et qui est son chanteur préféré. Il y va direct, et vous en met plein les yeux sur 170 pages à peine. Chapeau !

Pourtant, une fois n'est pas coutume, mais je trouve le film esthétiquement parfait de Jaromil Jires de 1970 bien mieux que le livre.
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