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Critique de horline


Illska est un roman étrange. Un roman qu'on n'abandonne pas même si on s'égare parfois dans cette fiction à la narration dense, ses récits qui se superposent mais qui le plus souvent s'entrechoquent, son présent englué dans les pesanteurs du passé... très vite se pose la question de savoir où Eiríkur Örn Norddahl nous emmène avec cette histoire ayant pour centre de gravité une histoire d'amour contemporaine ravagée par les flammes de l'Holocauste.
Puis la perplexité s'évanouit au fur et à mesure que la lecture progresse, si l'auteur défie les lois de la narration c'est pour mieux diffuser dans les soubassements du texte l'idée que nous avons une conception naphtalinée de l'Histoire et une vision trop dogmatique du mal (sens du mot Illska) et du fascisme. Celui-ci a su muer, s'adapter, prendre des formes pour s'immiscer dans la vie intime, investir un pays comme l'Islande préservé des horreurs et de cette mémoire européenne saturée d'images funestes. L'auteur n'hésite pas à interpeller le lecteur mais l'essentiel de sa démonstration passe par un triangle amoureux entremêlé aux réminiscences du passé, montrant une génération désorientée pour laquelle la guerre et la Shoah sont devenues une matière abstraite, un discours politique susceptible d'être piégé par des représentations idéologiques. le livre parle finalement du chaos contemporain, de ce réel qui nous échappe, de l'héritage de l'Histoire...

La forme enchevêtrée et les ruptures de ton pourraient lasser mais Eiríkur Örn Norddahl combine habilement la vie des personnages et le va-et-vient entre les époques. Il a su construire des ponts pour mêler l'Islande à l'histoire européenne, et le style énergique, les sarcasmes tout comme les réflexions politiques pertinentes parviennent à céder la place à une plume plus douce lorsque la dimension romanesque l'exige.
Seulement je dois dire qu'un certain flottement persiste : les ressorts psychologiques des personnages me sont parfois apparus obscurs, l'auteur islandais n'établit pas de correspondance entre les comportements et leur cause. La plume demeure à l'écart de ce qui est enfoui, de ce qui est muet si bien que les liens obsessionnels annoncés sont peu visibles...au lecteur d'établir les connecteurs logiques, de fournir un effort pour comprendre ces personnages un peu égarés sur le chemin des émotions. Surprenant pour un livre qui s'inscrit dans la sphère intime pour égratigner les déviances politiques.
Il reste que ce livre plein de paradoxes se lit pour le plaisir procuré par la liberté de ton pour un sujet un peu usé en littérature. L'auteur parvient à lui donner une perspective originale.
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