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3,4

sur 101 notes
C'est son histoire familiale mouvementée qui a conduit Agnes Lukauskaite à s'intéresser à la deuxième guerre mondiale, au nazisme, aux sort des juifs, au racisme et, par extension, à l'extrême droite en Europe de nos jours. Des sujets qu'elle aborde dans son mémoire de licence pour lequel elle interviewe Arnor, un néo-nazi islandais avec qui elle entame une relation. Mais Agnes vit déjà en couple avec Omar et quand elle se retrouve enceinte, elle est dans l'impossibilité de déterminer qui est le père. Pourtant rien ne prédisposait la jeune fille à tomber amoureuse d'un néo-nazi, ni ses principes, ni ses convictions, et surtout pas ses origines. Agnes, en effet, est d'origine juive lituanienne. Fuyant le communisme ses parents ont quitté Jubarkas. Jubarkas où, durant la seconde guerre mondiale, les habitants ont aidé les Einsatzgruppen d'Hitler à exterminer tous les juifs de la ville et où Vilhelmas Lukauskas, l'arrière-grand-père d'Agnes a tué Izak Banai, son autre arrière-grand-père.

Un roman difficile d'accès a priori que cet Illska, sous-titré le mal. Car c'est bien du mal qu'il s'agit, incarné par Hitler et ses sbires, dissimulé derrière la façade de respectabilité des partis populistes européens. S'il raconte la rencontre d'Agnes et Omar et leur vie de couple tourmentée par l'apparition d'un troisième protagoniste, Eiríkur Örn NORDDAHL entrecoupe son récit de considérations et de faits concernant la deuxième guerre mondiale, l'holocauste, le point Godwin, l'extrême droite en Islande, Suède, Danemark et même en France. C'est assez déstabilisant, d'autant qu'il fait fi de toute chronologie. Mais une fois l'habitude prise, on se passionne à la fois pour les histoires passées et présentes de d'Arnor, Agnes et Omar, et pour les interventions de l'auteur qui dénoncent certains partis populistes décomplexés qui sous des dehors respectables cachent un bon vieux fond de racisme. (Un chouette type ce Eiríkur). Puis dans une deuxième partie, on découvre les événements qui se sont déroulés dans la ville lituanienne de Jurbarkas durant la deuxième guerre mondiale. Comment la population est passé de l'occupation soviétique à l'occupation allemande. Comment les nationalistes ont vu là une occasion de chasser les juifs installés depuis des siècles dans la ville. Comment la ville est devenue ''judenfrei''. Et comment Vilhelmas Lukauskas en est venu à tuer son associé et ami Izak. Dans la dernière partie, peut-être la moins intéressante, on retrouve le triangle amoureux, réuni après moultes tribulations. La conclusion de cette somme de travail laisse un peu à désirer. Les interventions du bébé d'Agnes sont un brin longuettes et l'auteur n'a pas su choisir une fin. Il se perd et nous perd... Pourtant, on ne peut lui en vouloir tant le reste est d'une incroyable intensité.
Un livre qui bouscule les codes, qui interpelle, qui passionne, qui rappelle quelques vérités trop vite oubliées ces derniers temps où le FN croit se racheter une conduite en se colorant de bleu marine. A LIRE !
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Illska est un roman étrange. Un roman qu'on n'abandonne pas même si on s'égare parfois dans cette fiction à la narration dense, ses récits qui se superposent mais qui le plus souvent s'entrechoquent, son présent englué dans les pesanteurs du passé... très vite se pose la question de savoir où Eiríkur Örn Norddahl nous emmène avec cette histoire ayant pour centre de gravité une histoire d'amour contemporaine ravagée par les flammes de l'Holocauste.
Puis la perplexité s'évanouit au fur et à mesure que la lecture progresse, si l'auteur défie les lois de la narration c'est pour mieux diffuser dans les soubassements du texte l'idée que nous avons une conception naphtalinée de l'Histoire et une vision trop dogmatique du mal (sens du mot Illska) et du fascisme. Celui-ci a su muer, s'adapter, prendre des formes pour s'immiscer dans la vie intime, investir un pays comme l'Islande préservé des horreurs et de cette mémoire européenne saturée d'images funestes. L'auteur n'hésite pas à interpeller le lecteur mais l'essentiel de sa démonstration passe par un triangle amoureux entremêlé aux réminiscences du passé, montrant une génération désorientée pour laquelle la guerre et la Shoah sont devenues une matière abstraite, un discours politique susceptible d'être piégé par des représentations idéologiques. le livre parle finalement du chaos contemporain, de ce réel qui nous échappe, de l'héritage de l'Histoire...

La forme enchevêtrée et les ruptures de ton pourraient lasser mais Eiríkur Örn Norddahl combine habilement la vie des personnages et le va-et-vient entre les époques. Il a su construire des ponts pour mêler l'Islande à l'histoire européenne, et le style énergique, les sarcasmes tout comme les réflexions politiques pertinentes parviennent à céder la place à une plume plus douce lorsque la dimension romanesque l'exige.
Seulement je dois dire qu'un certain flottement persiste : les ressorts psychologiques des personnages me sont parfois apparus obscurs, l'auteur islandais n'établit pas de correspondance entre les comportements et leur cause. La plume demeure à l'écart de ce qui est enfoui, de ce qui est muet si bien que les liens obsessionnels annoncés sont peu visibles...au lecteur d'établir les connecteurs logiques, de fournir un effort pour comprendre ces personnages un peu égarés sur le chemin des émotions. Surprenant pour un livre qui s'inscrit dans la sphère intime pour égratigner les déviances politiques.
Il reste que ce livre plein de paradoxes se lit pour le plaisir procuré par la liberté de ton pour un sujet un peu usé en littérature. L'auteur parvient à lui donner une perspective originale.
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illska,"Le Mal", en Islandais est un roman du poéte et traducteur Eiríkur Örn Norddahl qui résonne en nous dés les premières lignes qui nous happe et nous frappe en pleine face comme une lame de fond.....: "Environ deux mille personnes ont trouvé la mort pendant l'écriture de ce livre. Ou plutôt deux cent mille. six millions de juifs.Dix - sept millions d'hommes, de femmes et d'enfants. Presque quatre- vingts millions d'êtres humains. Le monde ne sera plus jamais le même."
"Mais non, je rigole!
En fait, le récit d'Illska est d'abord celui d'Agnes et Omar, un amour qui commence lorsqu'ils attendent un taxi lors d'une nuit glaciale en 2009, à Reykjavik. L'héroïne est sans doute Agnès qui rédige une thèse sur le populisme et les extrêmes droites contemporaines, elle, dont l'appartement prend feu, elle qui couche avec Omar et le trompe un jour avec Arnor, un néonazi cultivé, fils de Sigga Dos, bibliothècaire, Arnor, le troisième pivot du roman....
Agnès, dont les - arriere- grands- parents ont traversé le massacre des juifs en 1941- victimes de l'occupation dans leur pays, les tortures et les massacres perpétrés par leurs propres amis.....témoignage trés émouvant.....
Omar qui met le feu à la maison et s'enfuit à travers l'Europe, jusqu'à Oradour sur Glane où son destin rejoint les préoccupations de son aimée .
Le premier tiers du roman est un tour de force s'appuyant sur diverses " mises en perspectives " de la Shoah et "des années 39- 45".
Il dévoile progressivement le passé des personnages et raconte ce ménage à trois.L'auteur conte les faits en changeant sans cesse le point de vue narratif, tantôt du point de vue du jeune homme , tantôt celui d'Agnes " obsédée " par " la seconde guerre mondiale ", en raison de sa propre histoire,
surtout par ce qui se passait à Jubarkas ( Lituanie) , ville dont sa famille est originaire et dont toute la population a été massacrée.
Illska est un ouvrage inhabituel , ouvert à toutes les démesures, à tous les thèmes, l'Holocauste, la trahison, la mémoire historique, d'Islande, de Lituanie, d'Europe, des résurgences fascistes d'aujourd'hui, de notre fascination pour le Mal. Il explore tous les lieux de pensée oú cette guerre a le mauvais goût de se nicher.
Agnès la thésarde," avait la guerre non seulement sur les bras mais également dans la tête et dans le cœur ."
Le grand sujet d'Illska, roman si inventif, c'est le réel, le narrateur joueur, cynique, ironique, pédagogue ,nous prend à témoin. Il brasse le mal et interroge le fascisme et ses avatars contemporains avec brio, donne chair et sens à tout ce qu'il écrit ....
A part la dernière partie, un peu confuse, bien moins réussie, ce livre intense nous bouscule, nous passionne, nous interpelle, nous interroge inlassablement....
Il nous montre avec fougue, pédagogie, intelligence, cruauté et drôlerie la façon dont l'histoire et l'idéologie imprègnent nos sphères les plus intimes.
Un roman impressionnant , immense. Riche et Surprenant !
Une découverte que je ne regrette pas !

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Illska, c'est l'histoire d'Agnès qui, pour rédiger un mémoire pour son mastère, décide de s'intéresser au nazisme et au néonazisme. Elle rencontre un jeune néonazi, Arnor, avec qui elle trompe Omar.
Illska est donc l'histoire de ce trio, mais c'est aussi l'histoire de l'Islande et de la Lituanie.
Une histoire d'hier et d'aujourd'hui.
Une histoire du monde.
Décliné en quatre parties de valeurs inégales.
J'ai détesté la première partie. Celle où l'on découvre les personnages, certes, mais je n'ai pas aimé la vulgarité employée en particulier pour parler de sexe. Sexualité omniprésente tout au long de cette partie du livre. Je n'ai pas aimé non plus, ces quelques phrases qui parlent d'Hitler, ses sbires, de l'holocauste, du nazisme distillées entre chaque paragraphe.
J'ai par contre aimé la seconde partie, celle où l'on découvre les origines Lituaniennes d'Agnès. Ce qu'ont vécu ses grands parents. Victimes de l'occupation dans leur village, les tortures, les massacres, parfois perpétrés per leur propres amis. Un témoignage émouvant.
Tout comme les origines d'Arnor, de sa naissance aux drames qui ont jalonnés sont enfance.
La troisième partie m'a laissé perplexe. C'est Omar que l'on découvre, en même temps que l'on suit l'arrivée du bébé d'agnès, dont elle ignore qui d'Omar ou d'Arnor est le père. Un récit haché par les interventions des pensées de l'enfant qui perturbent la narration.
Dans la dernière partie, le passé et le présent se télescopent. On revient sur le passé dramatique de la famille d'Agnès et on vit l'épilogue de l'histoire présente. Une fin trop confuse à mon goût, où se mélange réalité et fiction, faits et possibilités.
Sans y avoir pris un immense plaisir, je ne rejette pas cette lecture. Certains effets de style et certaines grossièretés inappropriées m'ont agacé, mais l'ensemble se laisse lire.
Je dirais, pour conclure, que je pensais en apprendre plus sur l'idéologie et les motivations des néonazis.
J'ajouterai, avec un clin d'oeil, et l'auteur n'y est pour rien, que l'Islande est certainement un beau pays, mais… que de noms imprononçables.
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Un roman islandais, plein de réflexions sur le populisme et le nazisme.

Un peu rébarbatif au départ, car l'histoire est entrecoupée d'extraits qui tiennent davantage de l'essai. C'est intéressant, mais on se demande si on ne s'est pas trompé de genre. C'est un peu comme si on nous présentait les théories avant la pratique…
Mais ces théories font partie de l'histoire, car l'héroïne est une universitaire en train d'écrire sa thèse portant sur les groupes néonazis d'Islande. Elle se sent d'autant plus concernée par le sujet que ses parents sont d'origine lituanienne, ils viennent d'un village où ses ancêtres juifs ont été massacrés par les Allemands, mais aussi par ses ancêtres Lituaniens. Des chapitres retourneront à l'époque de la Seconde Guerre mondiale pour raconter ce qui s'est passé, les horreurs de gens ordinaires qui deviennent des tortionnaires.

En parallèle, des histoires d'amours et de sexe, avec le conjoint de cette femme qui est anéanti lorsqu'il découvre qu'elle le trompe avec un extrémiste qu'elle a interviewé pour ses recherches.

Un roman bien touffu donc, qui traite aussi bien de l'Histoire et de réflexions politiques que de détails de la vie quotidienne. À côté des cauchemars de la guerre, on aura même des paragraphes du point de vue du bébé du couple!

Un roman intéressant, mais une lecture qui dérange plus qu'elle ne divertit…
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La création littéraire est toujours un mystère. Si Illska est un livre du XXIe siècle, il est d'abord par sa forme avant de l'être sur le fond, même si la première se nourrit forcément du deuxième. Si le roman d'Eirikur Örn Norddahl avait été écrit dans un respect total de la chronologie, quel aurait été le résultat ? Alors que là, déconstruit, haché menu entre 1) ses personnages actuels à différents moments de leur vie, 2) les protagonistes juifs d'un petit village lituanien sous la botte allemande, 3) les pensées d'un bébé, 4) les considérations de l'auteur lui-même tour à tour ironiques, cyniques, historiques, graves ou saupoudrées d'humour très noir, avouons qu'il y a de quoi y perdre son islandais. Au milieu coule pourtant une histoire d'amour mais le côté romanesque du livre est emporté comme un fétu de paille par les réminiscences du passé et par la barbarie de l'homme puisque le thème principal en est le Mal avec un M majuscule. le livre est éreintant, déconcertant, agaçant par sa structure on ne peut plus décomposée. Il y a moyen de ne pas s'y perdre mais cela demande de très gros efforts. La partie la plus intéressante concerne la Lituanie qui, à l'instar d'un autre pays balte, l'Estonie, a traversé de longues années noires du nazisme au communisme. On peut penser à Purge, de Sofi Oksanen, déjà bien complexe, mais Norddahl pousse la réflexion encore plus loin avec le recul d'un écrivain islandais, profondément ancré dans l'histoire européenne. Maelström n'est pas un mot d'origine islandaise mais il convient bien à Illska, roman tentaculaire et puissant qui repousse toutes les limites. Y compris celles de la patience du lecteur ? Cela, c'est un sentiment qui différera singulièrement selon la personnalité et la sensibilité de chacun.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Il est toujours hasardeux de porter un regard critique sur un livre qui vous a été aimablement offert surtout si votre ressenti n'est pas à la hauteur de vos attentes initiales.
Et pourtant, une quatrième de couverture particulièrement alléchante me laissait augurer une lecture aussi agréable qu'enrichissante d'un auteur islandais apparemment prometteur.
Malheureusement, n'en déplaise à certain(e)s (les recensions postées sur ce site sont majoritairement très élogieuses), mon plaisir fut de courte durée.
Dès l'entame, les incessants chassés-croisés, dont je n'ai manifestement pas saisi la subliminale cohérence, entre le passé (montée en puissance des totalitarismes dans les années trente, la seconde guerre mondiale et plus spécifiquement les massacres perpétrés à l'encontre de la communauté juive par les Einsatzgruppen aidés en cela par une partie de la population locale lituanienne) et le présent affectivement plus que perturbé d'un trio islandais bien improbable ainsi que la résurgence des populismes identitaires en Europe m'ont progressivement et profondément agacé.
Le tout nous est servi en un style pour le moins décousu, par une écriture quelquefois insipide, stérilement vulgaire voire gratuitement provocatrice.
Cet indigeste pavé de 600 pages est également abondamment saupoudré de considérations historiques, philosophiques, sociologiques ou politiques certes non dénuées d'à-propos mais brassant nombre de lieux communs et ne brillant donc pas spécialement par leur originalité.
Bref, s'il n'avait tenu qu'à moi, j'en aurais sans doute assez rapidement abandonné la lecture mais, par respect pour mon généreux donateur, je me suis forcé à boire le calice jusqu'à la lie.
J'assume volontiers la virulence de mes propos mais elle est à l'aune de mon ressentiment, de ma profonde déception et ce ... en toute subjectivité.

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La première partie du livre, je l'ai trouvée édifiante. Bousculante. L'auteur secouait le cocotier. Une jeune femme islandaise, qui termine un travail de fin d'étude sur le nazisme s'éprend d'un néonazi et va tromper son compagnon, et ne sait déterminer qui est le père de son enfant. Cette jeune femme, Agnès, s'intéresse au nazisme car ses parents sont originaires de Jurbakas en Lituanie où un grand-père paternel était nazi mais ses autres grands-parents paternels juifs, le premier tuant le second grand-père, alors qu'ils étaient amis.

J'ai bien aimé les mises en perspective de l'auteur, pourquoi assimilons-nous l'Holocauste aux Juifs massacrés, sans ou rarement parler des deux autres tiers de victimes d'Hitler. Pourquoi parlons-nous sans arrêt du nazisme et non de Staline (voire de Mao) dont le nombre de victimes sont de très loin supérieurs, mais l'omerta continue à planer sur ces victimes-là comme si les unes étaient acceptables et les autres non. La vision des immigrés (Agnès n'est islandaise que de seconde génération) est également interpellante.

Et puis, dans la seconde partie, tout s'enlise. Et devient une gadoue informe. Tout d'abord, l'idée de déstructurer le roman devient de plus en plus inintéressante et semble noyer l'absence de fond. Cette absence de fond est surtout due à la vacuité des personnages masculins : Omar, le compagnon d'Agnès, glandouille et on se demande bien ce qu'elle lui trouve. Arnor, le néonazi qu'Agnès connaît depuis longtemps mais avec qui elle va avoir des relations sexuelles qu'une fois qu'elle rencontre Omar (!?), est plus caricatural que jamais. Petit sans être nain, le décrit Agnès, perclus de tics. Et puis, et puis, il y a tous les champs des possibles que recelaient les prémices fort riches qui n'ont pas été exploités.

En un mot comme en cent, j'ai cru commencer un coup de coeur et véritablement la première partie sauve à mes yeux la seconde, qui va de plus en plus dans le sens d'une grande débandade et lui vaut finalement un avis mitigé.

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Voici la parfaite illustration de l'intérêt de participer à un jury littéraire. Si je ne m'étais pas engagée dans l'aventure du Prix du Meilleur Roman des lecteurs de Points, les chances pour que je m'intéresse à ce livre auraient été très faibles. Un roman islandais, le thème de l'Holocauste, 700 pages. J'aurais sans doute écouté mon libraire me chanter ses louanges, jeté un coup d'oeil à la quatrième de couverture, l'aurais feuilleté, soupesé... et reposé en me disant que bon... peut-être... plus tard. Aurait-ce été dommage ? Incontestablement.

Pourtant, on ne peut pas parler ici de plaisir de lecture. J'ai même été soulagée en arrivant au bout. Attention, ce n'est pas non plus une torture. Non. Simplement le sujet est si fort, l'image que ce livre renvoie de notre monde, de notre société est si terrible qu'il se lit parfois le coeur au bord des lèvres, entre fascination et colère où pointe aussi parfois une once de désespoir et de découragement. En le refermant, c'est tout de même l'admiration qui prédomine. Car l'auteur traite son sujet avec une maîtrise indéniable et offre un texte riche, une infinie matière à réflexion. Ce qu'il nous propose c'est de regarder la nature humaine au fond des yeux, dans ce qu'elle a de pire. Ce mal qui se transmet de siècle en siècle et ronge les sociétés les plus civilisées. Ce qu'on appelle nationalisme, populisme, protectionnisme, qui a généré le fascisme et le nazisme et a connu son pic de gloire avec l'Holocauste. Un mal qui n'a pas disparu.

"Les choses ne sont pas si simples. Pas si simplistes : les gens ne se résument pas à la somme de leurs expériences."

Pour dérouler son intrigue, l'auteur met en scène un curieux ménage à trois à Reykjavic dans les années 2010. Agnès, Omar et Arnor. Agnès est une jeune femme de 27 ans originaire d'un village de Lituanie qui a été le théâtre d'un certain nombre d'atrocités pendant la seconde guerre mondiale avant de tomber sous le joug communiste. Totalement obsédée par l'Holocauste, elle mène des recherches en vue de rédiger une thèse sur les populismes et l'extrême-droite en Islande. En couple avec Omar, elle tombe également sous le charme d'Arnor, l'un de ses sujets d'étude, un néo-nazi. Un véritable tsunami personnel dont l'auteur va s'appliquer à nous faire comprendre les racines par quelques incursions historiques dans le village natal d'Agnès et nous donner à voir ses ramifications dans l'Europe du 21ème siècle.

Si ce livre est aussi fort c'est certainement parce qu'il fait ressentir comme rarement que les pires atrocités sont bien commises par des hommes. le mal n'est ni démoniaque ni un phénomène incontrôlé. Il est bien l'émanation de comportements humains. En remontant le fil historique des massacres qui se sont succédé dans le temps, en explorant les facteurs de transmission, l'auteur livre un roman unique et terrifiant. Certes, la région du monde dans laquelle se situe l'intrigue n'est pas anodine. Les pays baltes occupés tantôt par l'Allemagne, tantôt par l'URSS, l'Islande dont Hitler vantait la pureté de la race... Tout ceci a laissé des traces. Mais la contagion est bien réelle et l'auteur en fait une démonstration implacable.

Ce livre nous rappelle le poids de l'histoire, le lourd héritage que nous portons tous. D'une virtuosité inouïe, ce roman est une contribution remarquable à quelque chose qui va au-delà du devoir de mémoire, disons à l'éducation du citoyen peut-être. Pas léger, c'est sûr. Mais terriblement important.

"C'est le message de ce livre. Nous sommes le message de ce livre. Je m'efforce d'aller au coeur d'un certain nombre de choses. N'oublions pas Hiroshima, Auschwitz, Guernica, Pearl Harbour et Dresde. Si la Seconde Guerre mondiale nous a enseigné quelque chose, elle nous a appris l'oubli. A oublier de ne pas oublier. A ne pas oublier d'oublier de ne pas oublier. A ne pas laisser retomber la pâte."
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Agnès, jeune thésarde écrit un mémoire sur l' extrême droite en Europe.
Elle aime Omar, mais aussi Arnor, un néonazi.
Voilà pour la petite histoire. Mais elle est imbriquée dans la grande histoire.
Une grande puissance d'écriture pour un jeune auteur. Quelle maîtrise !
Un roman complètement inhabituel sur l'histoire de l'holocauste et des victimes de la seconde guerre mondiale.
Un roman complexe dans la construction, où l'on ne sait pas toujours qui est le narrateur, où plusieurs histoires sont racontées simultanément.
Un roman historique et contemporain sur l'Islande et la Lituanie.
Un roman aux thèmes abondants : le bien et le mal, l'influence des origines, l'immigration, le racisme, la folie des Hommes, l'amour……
Un roman qui s'adresse directement au lecteur et le laisse maître de ses opinions.
Un roman peu commun qui interpelle et mobilise l'esprit.
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