Citations sur Liberté, Egalité, Fraternité (22)
La gauche représente une tradition dans laquelle la notion de fraternité se combine avec celle de l'altérité : on est frère avec l'autre, avec celui qui ne nous ressemble pas, voire qui n'est pas de notre pays. La droite, plus traditionnellement, incarne une fraternité du même, du semblable, de la patrie. Où mettre le curseur de l'altérité dans cette notion de fraternité est le point sur lequel divergent ces deux courants politiques.
La notion d'égalité est-elle ambivalente ?
Bien sûr, car l'égalité c'est aussi l'inégalité. La conquérir, c'est aussi se détacher du monde d'où on vient, prendre sa distance avec lui, voire le mépriser. Elle est ambigüe aussi par cette question : jusqu'où peut-on déplacer la frontière de la liberté pour créer de l'égalité ?
"Si vous me demandez pourquoi je veux être libre, je vous réponds parce que j'en ai le droit. J'en ai le droit parce que l'homme est égal à l'homme."
Pierre Leroux
La dette envers l'autre ne s'arrête jamais : elle est perpétuelle, intrinsèque, incorporée. Depuis, la culture démocratique individuelle a de plus été couplée au délire de l'argent qui, lui, est plutôt une force de séparation : l'argent clôt l'échange, la dette symbolique cesse enfin.
Dans les années 1950, le psychanalyste anglais Donald Winnicott a établi les premières différenciations entre le cure ( "guérir" en objectivant la maladie, au risque de chosifier le malade) et le care (" soigner " en prenant en considération la personne).
Les inégalités sont un réel problème pour la fraternité, mais ne nous leurrons pas, nous avons aussi un vrai problème de déficit de culture incorporée de la fraternité.
Nos sociétés ont perdu la culture de la fraternité : nous en avons une culture déclarative, mais plus une culture normative, "incorporée" - c'est-à-dire qui transforme réellement le vécu collectif et individuel.
Nous aurions pu changer notre devise en remplaçant Fraternité par Solidarité, mais le peuple français reste attaché à cet idéal d'indivisibilité, symbolisation très forte de l'humanité toute entière et non des seuls ressortissants nationaux. Notre fraternité française est républicaine et internationaliste. La solidarité n'est pas exclusivement nationale, du moins dans notre idéal. La traduction laïque de la communauté divine, c'est la fraternité dans son acception universaliste.
Il est clair que cette notion [la fraternité], dans notre devise républicaine, contient tout cela à la fois : notre fraternité laïque et sociale est sacralisée en lieu et place d'une fraternité christique ou plus spirituelle. La République fait de nous des frères que nous ne sommes pas sans elle. Après 1848, et la naissance de l'Etat social, nous pouvons poser que la République sociale et solidaire fait de nous des "frères", dissemblables mais égaux en droits.
(...) en matière d'égalité, si les conditions matérielles sont importantes, la dignité, la recognition, le sont aussi.