Je me suis complètement laissé prendre par ce roman.
Martin Page joue habilement avec tous les ressorts classiques du super-héros (mort tragique des parents, solitude, mélange de crainte et d'estime par les gens "normaux", les opérations de secours humanitaire, les manipulations politiques, le savant fou, etc.) pour les détourner. Ce jeu sur ce topos permet de mettre à distance le récit proprement dit (et donc les péripéties) pour se concentrer justement de ce qui diffère d'un comics ou d'un film traditionnel.
J'ai notamment apprécié que, contrairement à la très grande majorité du genre, le roman ne pose presque pas la question de la moralité : Margot reste une personne foncièrement bonne (malgré quelques actions discutables ^^) et ne se laisse pas entraîner sur des pentes dangereuses. Non, la question centrale, c'est celle de "l'identité", de la construction de soi avec et contre les autres. Ce n'est donc pas un livre sur l'héroïsme, mais au contraire sur l'humanité (on pourrait aussi dire, en essayant de suivre l'évocation de
Michel Foucault dans les remerciements, qu'il s'agit de faire voir ce qu'il se passe lorsque les normes traditionnelles se détruisent...).
Les personnages sont très bien construits, avec une inversion adultes imbéciles / ados sages qui fait un peu penser aux films de
Wes Anderson. Chaque personnage adulte est enfermé dans un rôle bien précis, caricatural, alors que Margot doit composer avec des tiraillements contradictoires. On sort complètement de l'habituel idéalisme de l'adolescent qui doit se confronter au "réel". C'est ce qui fait que l'on s'attache beaucoup à ce personnage et que se crée une forme de suspense.
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