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Critique de elisecorbani


La maison d'édition de la Reine Blanche est spécialisée dans l'édition de nouvelles et récits courts, avec une démarche très soignée que ce soit sur le plan du contexte intellectuel que de l'esthétique.
Privilégiant la traduction d'auteurs et autrices de premier plan mais méconnus en France, l'éditeur fait intervenir en préface des universitaires qui permettent au lecteur d'entrer dans une meilleure intelligence de l'oeuvre.

Sur le plan esthétique, l'objet livre est élégant, compact, valorisé par un ensemble d'illustrations exclusives commandées par l'éditeur à un illustrateur ou artiste inspiré par l'oeuvre. Une démarche très originale et pleine de sens qui offre au lecteur une expérience de lecture intense et originale.
Il faut donc saluer avant de commencer cette critique des Naufragées, ce travail editorial remarquable et courageux qui allie l'exigence intellectuelle à celle de l'esthétique et du plaisir de la lecture.

Durant sa longue carrière littéraire, Emilia Pardo Bazan a publié des centaines de nouvelles et récits courts, notamment dans la presse qui lui permettait de toucher un large public. Les Éditions de la Reine Blanche en ont déjà publié un recueil sur le thème de l'amour. Cette sélection de 21 nouvelles présentées chronologiquement de 1883 à 1915, souvent très courtes, présente de destins de femmes brisés par l'oppression sociale et patriarcale. D'où le titre du recueil, Naufragées, qui reprend celui d'un des textes. Il m'est venu à l'esprit en lisant le titre de Dostoïevski, décliné au féminin, Humiliées et offensées, qui aurait pu convenir également.

L'efficacité de la plume de la grande autrice espagnole s'exprime pleinement dans ces récit minimallstes, coupants comme des couteaux. Tout y est cruel et impitoyable, simple reflet de la violence absurde qui brise le destin de ces innocentes. Comme Dostoïevski, la comtesse de Pardo Bazan s'inspirait beaucoup de la lecture de la presse et des faits divers. On en trouve la trace brutale dans ces récit qui reflètent une réalité qui dépasse souvent l'imagination.

A mon sens il faut lire ce livre par petit pas, car chaque récit porte un impact dans l'imagination du lecteur, d'autant plus vif que la lecture est brève. Les registres littéraires explorent toutes les pistes, de la farce, satire sociale, au point de vue naturaliste, en passant par le conte et le symbolisme.
Les thèmes ne sont pas joyeux : violence conjugale et familiale, maladie psychique, humiliation de classe, violences liées à la guerre, déclassement et prostitution... renvoient au pouvoir absolu de l'homme qui s'exerce sur la femme que ce soit dans le cadre privé ou social.

La seule lueur d'espoir subsiste dans certains récits par la solidarité qui s'exprime, entre ces femmes naufragées bien sûr mais aussi parfois de la part des hommes qui peuvent être un soutien. A lire et relire, à faire lire et à offrir pour encourager le travail courageux de l'éditeur. Merci à Babelio et aux éditions de la Reine Blanche pour cette découverte par le biais de la Masse critique.
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