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Critique de JIEMDE


Inside the black bloc !

Juillet 2001, quatre jours qui ébranlèrent Gênes et l'Europe. Quatre jours qui ébranlèrent, un peu, le monde. Quatre jours et 1 mort. Un de trop. Il y avait eu les contre-sommets altermondialistes de Seattle en 1999, Prague et Nice en 2000 et aussi Göteborg quelques semaines avant. Autant de signes avant-coureurs d'une tension grandissante qui appelait nécessairement une réponse.

Cette réponse, elle advint à Gênes lors du G8 de cet été 2001. Et quelle réponse ! D'un côté, la bunkerisation des 8 plus grands dirigeants mondiaux et de leur cour dans une partie de la ville devenue camp retranché, inaccessible derrière les barrages et défenses policières, symbole éclatant du fossé les coupant toujours un peu plus du monde réel.

De l'autre, 400 000 contre-manifestants attendus de pied ferme par des policiers préparés et gonflés à bloc par leur hiérarchie, issue des partis nationalistes d'extrême droite opportunément alliés à Berlusconi. le piège est prêt. Et l'envie de violence des carabinieri est telle que le combat est forcément inégal.

Dans La nuit tombée sur nos âmes, Frédéric Paulin raconte ces journées à travers le prisme des différents protagonistes qui les ont suivies ou vécues : Nathalie la toto et son mec Chrétien « Wag », ex-LCR découvrant la mouvance anarchiste et le black bloc ; Génovefa et Erwan les journalistes français envoyés spéciaux ; Martinez et Cazalon, les flics français infiltrés chez les gauchos.

Mais il y a aussi – et surtout – tous les apprentis sorciers politiques, qui jouent à celui qui sera le plus grand manipulateur, de Lamar le chargé de com' de l'Élysée, à Carli et Calvini, boutefeux italiens dont les tambouilles et inconséquences aboutiront à la mort du jeune Carlo, 23 ans.

Si le livre de Paulin est à charge – et pourquoi pas ? – semblant parfois pousser à l'excès la violence aveugle des policiers italiens durant ces quatre journées, il suffit de se remémorer les images vues à l'époque (véritables scènes de guerre télévisées) ou les multiples jugements survenus par la suite en condamnations diplomatiques ou judiciaires de ces violences policières, pour prendre conscience a posteriori de l'effroyable réalisme de ce roman.

Parallèlement, la vision que Paulin livre sur les divergences et inimitiés profondes des différents groupuscules qui composent l'extrême gauche et la désillusion – le mot est faible - de Nath et Wag au fur et à mesure des événements, montre que la tendance qui conduit généralement à mettre tous les participants des contre-sommets dans le même sac de beatniks désoeuvrés est aussi stupide que contre-productive.

Côté politiques, les dirigeants de ce G8 ne sortent pas grandis du roman, au premier rang desquels Bush fils et Berlusconi, désespérément sourds et incompréhensifs face à ce qu'il se passe à quelques mètres d'eux. Avec néanmoins une exception faite pour Chirac sans que l'on n'arrive à savoir si son intérêt participe d'un véritable début de compassion ou du flair politique légendaire du baron corrézien.
Un dernier mot enfin : si les contre-sommets se sont apaisés, les mêmes enjeux se rejouent aujourd'hui autour des grands rassemblements liés au climat, avec la même impression d'incompréhension. Mais cela fait longtemps qu'on sait bien que l'histoire ne fait que se répéter. Alors rien que pour cela, la lecture de Paulin est importante !
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